Laurent Caire (1731-1800)

Vie familiale

Laurent Caire nait le 15 septembre 1731 à Toulon. Son père Alexandre Caire est négociant et lui-même devient négociant, comme son frère Joseph Caire et ses beaux-frères Jean François Aguillon et Charles Honoré Granet.

Le 10 janvier 1775, à 43 ans il épouse Alexandrine Victoire de l’Epine du Planty, fille de Charles François de l’Epine du Planty, ordonnateur des vivres de la Marine à Toulon. Ils ont cinq enfants :

  • Victoire, née le 19 octobre 1775. Vistoire épousera Paul Guigou et décédera à Livourne sans avoir eu d’enfant.
  • Eugénie, née le 31 décembre 1776. Handicapée (autiste ?), Eugénie restera célibataire et décèdera à Gémenos.
  • Honorine, née le 2 octobre 1778. Honorine épousera François Mille et décèdera à La Seyne sur Mer sans avoir eu d’enfant.
  • Alexandre, né le 21 mars 1780 et décédé jeune.
  • Louis-Laurent né le 19 juin 1788. Il épousera Cécile Pascalis, auront des enfants et il décèdera à Gémenos.

Laurent Caire est témoin aux baptêmes de :

  • François Laurent Prat, le 17 novembre 1763 à La Seyne sur Mer1,
  • Laurent Hecker, le 10 avril 1788 à La Seyne sur Mer, les parents habitent la propriété de Laurent Caire, quartier du manteau2.

Vie professionnelle

En 1772, il achète deux vieux navires, l’Altier et l’Aventurier, les fait radouber et armer pour les mettre sur la ligne d’Amérique et des Antilles ; il a toutefois des difficultés avec la Marine pour obtenir la cession des agrès nécessaires à ces bâtiments à la veille de la guerre de l’Indépendance des Etats-Unis3.

En 1773, chargé de la fourniture du pain des troupes de la marine, il cherche à acheter des denrées à Alger4.

En mars 1780, pendant la guerre d’Indépendance américaine, Le Sagittaire, vaisseau du roi, débarque à Toulon trente-quatre barils de cochenille fine et sept de cochenille en grabeau pris dans le port de Cadix à consignation de Laurent Caire de Toulon pour des négociants marseillais5.

Les affaires marchent très bien et Laurent fait fortune : trois maisons à Toulon, une fabrique de cordes place de la Lune à La Seyne, un vaste et belle propriété de 76 hectares du quartier de Tamaris à la colline Caire (aujourd’hui fort Napoléon), avec 121.241 cannes de bois, 69.318 cannes en arbres fruitiers, une maison de maître, la Guirane, et plusieurs autres bâtiments6… Il prête de l’argent à de nombreuses personnes, en particulier au lieutenant-général de Coincy, gouverneur de Toulon, et se porte garant de Jean Sicard, trésorier des invalides de la Marine.

En 1781, Laurent Caire est consul de Toulon7.

En octobre 1786, Ishak Bey, émissaire du prince Sélim, futur sultan Sélim III, arrive à Toulon où il est accueilli et hébergé par Laurent Caire8.

A Toulon sous la Révolution

Le 24 juillet 1790, Laurent Caire est accusé d’accaparer les blés pour en faire monter le prix|19. Lettre du 19 septembre 1790 de Laurent Caire à Jean Abeille, annotée par Henri Foulcher].

Le 20 mai 1793, les trois corps administratifs de Toulon ordonnent l’arrestation de « toutes personnes ci-devant nobles, ecclésiastiques et autres suspectes », dont Laurent Caire. Sur les vives protestations des habitants de Toulon et des bourgs voisins, les 73 notables sont remis en liberté sous caution9.

En mai 1793, Victoire et Eugénie Caire séjournent au château d’Ognon, chez leur tante Mme de Chevigné10.

Le 12 juillet 1793, la ville de Toulon se révolte contre la Convention et proclame Louis XVII roi de France. La convention envoie les troupes sous les ordres du général Carteaux, puis du général Dugommier secondé par le capitaine Bonaparte.

Le 28 juillet, toute la ville est réunie pour une procession et un Te Deum pour la libération des 73 otages, dont Laurent Caire11.

Pour financier la guerre, le comité général de Toulon, par sa délibération du 16 septembre 1793 mandate Laurent Caire et Jacques-Antoine-Louis Pernety, ancien trésorier payeur général de la Marine, pour aller négocier un emprunt d’un million de piastres fortes, garanti par une hypothèque sur les propriétés communales, l’arsenal et les vaisseaux12. Une division anglo-espagnole, commandée par les amiraux Gell et Moreno, appareille le 1er octobre et transporte Laurent Caire et Jacques-Antoine-Louis Pernety et arrive à Gênes le 5 octobre. Ils y sont les témoins d’une échauffourée entre les deux vaisseaux anglais le Bedfort et le Saint-Georges et le vaisseau français la Modeste13. Le 19 octobre, Laurent Caire envoie à la municipalité de Toulon un rapport pessimiste sur les chances de succès de cet emprunt14.

Les troupes anglaises s’installent sur les terrains de Laurent Caire : « Tous les arbres de la forêt, les arbres fruitiers, toutes les provisions, les récoltes, tous les objets servant à l’exploitation du domaine, furent pris, employés aux fortifications, au chauffage et à la consommation de l’armée15. »

Le 18 décembre 1793, Laurent Caire émigre avec sa famille à Livourne16.

Le 19 décembre, les troupes révolutionnaires entrent dans Toulon et pillent et saccagent les maisons de Laurent Caire. MM. Bonneti en partant de Toulon ont laissé tous les titres des débiteurs Caire dans un bureau et ils sont perdus17.

Laurent Caire s’était porté caution pour M. Jean Sicard, trésorier des invalides de la Marine et le 26 Floréal an II – 15 mai 1794 – au titre de cette caution, la Marine saisit tous les biens de Laurent Caire et les vend aux enchères pour 109 795 francs en Assignats (soit 27 934 francs en numéraire, un prix très bas car outre l’état de ces biens, la ville de Toulon était dépeuplée et exsangue). Cette vente ne suffit pas à couvrir la caution18.

A Livourne, se constitue une importante communauté d’émigrés français : Jean Abeille et sa famille, les Aguillon, les Daniel, François Mille, Paul Guigou, Marie Ludivine du Fay, belle-mère de Laurent Caire, les Fournier…

Le 28 mars 1794, Laurent Caire écrit à son excellence, Monsieur le chevalier Elliot, ministre plénipotentiaire en Corse pour demander une indemnité pour ses pertes à Toulon, qu’il chiffre à 1.556.000 Livres19. Laurent Caire obtient du gouvernement anglais une pension de 100 livres par an.

Laurent Caire meurt à Livourne le 21 septembre 1800.

Succession de Laurent Caire

A son retour en France, sa femme va trouver les débiteurs de Laurent Caire et parvient parfois à obtenir une reconnaissance de dettes. C’est ainsi que le 4 janvier 1804, Madame Sinéty de Coincy, veuve du lieutenant-général de Coincy, reconnait devoir 3 800 Francs Tournois. Malheureusement, cette créance ne sera que très partiellement honorée20. Alexandrine Victoire de l’Epine du Planty arrive aussi à récupérer la Corderie à la Seyne et la Maison du Parti à Toulon.

Lors du vote de la loi du 27 avril 1827 sur l’indemnisation des émigrés, Louis Laurent Caire présentera une demande d’indemnisation qui sera rejetée au motif que les biens de Laurent Caire ont été légalement vendus comme caution de M. Jean Sicard.

Le 15 janvier 1827, François Mille, époux d’Honorine Caire et gendre de Laurent Caire, achète le domaine de la Rouve, c’est à dire une partie de l’ancienne Guirane de Laurent Caire. Adolphe Caire héritera de la Rouve et la vendra à Michel Pacha.

Notes et références

  1. Archives départementales du Var, page 458/536
  2. Archives. départementales du Var, page 371/502
  3. Histoire de La Seyne, de Louis Baudoin (1965)
  4. Archives des Affaires étrangères. Correspondance reçue du consulat d’Alger (1642-1792), côtes F°230-233
  5. Perception, construction et utilisation de l’espace. D’Oaxaca à Bassorah : les négociants marseillais et la cochenille mexicaine au XVIIIe siècle, Gilbert Buti
  6. Lettre de Henri Foulcher du 21 septembre 1985 avec en annexe une lettre de Laurent Caire au chevalier Elliot du 28 mars 1794
  7. La chronologie des syndics, consuls et maires de la ville de Toulon depuis 1252, Service des archives municipales de Toulon
  8. Revue d’histoire diplomatique, 26ème année, pages 524 et 525
  9. Toulon sa rade, son port, son arsenal son ancien bagne, Mongin, p 63 et 291
  10. Lettre de Camille Aubin du 19 mai 1828
  11. Mémoires pour servie à l’histoire de la ville de Toulon en 1793, Z. Pons, pages 39 et 40
  12. Mémoires pour servie à l’histoire de la ville de Toulon en 1793, Z. Pons, pages 104 et 294
  13. Toulon et les anglais en 1793, Paul Cottin
  14. Situation économique de Toulon pendant la rébellion (juillet-décembre 1793), par Eugène Coulet
  15. Supplique des héritiers de Laurent Caire à Messieurs de la chambre des députés – 15 décembre 1817
  16. Bulletin de la Société d’études scientifiques et archéologiques de la ville de Draguignan, tome XXXIV, page 555
  17. Lettre de Paul Guigou du 25 mai 1825
  18. Lettres de Paul Guigou du 26 août 1825, de M. Cogolin du 23 novembre 1824 et de François Mille du 5 juin 1825
  19. Lettre du 28 mars 1794 recopiée par Henri Foulcher
  20. Lettre de Victorine de Coincy du 24 février 1814

Supplique des héritiers de Laurent Caire à Messieurs de la chambre des députés – 15 décembre 1817

1817-12-29 – Borie – Envoi de la supplique à la chambre des députés

Messieurs,

C’est lorsque l’absence, l’incertitude ou l’insuffisance des lois se fait sentir, lorsque tout autre autorité est frappée d’incompétence, mais seulement alors, que le recours à la vôtre devient indispensable : tel est l’unique motif qui détermine les soussignés à soumettre à votre médiation les deux questions suivantes.

Un tort souffert par un Français, victime de la force majeure, mais dont le but légalement démontré a été, de la part de ses auteurs, de coopérer au rétablissement de Sa Majesté Louis XVII sur le trône de ses ancêtres, constitue-t-il en sa faveur, une créance qui doive être considérée comme une dette de l’État ?

Quand la Loi est muette, quand les Ministres de Sa Majesté n’ont aucun crédit assigné dans le budget pour faire face à une dépense, n’est-ce pas à vous seuls, appelés à voter l’impôt, qu’il faut avoir recours pour y suppléer ?

Ces deux questions, avec quelque simplicité que nous ayons cherché les poser, ont besoin de développements pour en faciliter l’intelligence. Leur solution servira de base à notre demande tendante à ce que, dans le budget de 1818, il soit ouvert un crédit à l’un des Ministres de Sa Majesté, pour faire face au paiement de la somme de 209,154 fr. 10 c., montant des dégradations commises et enlèvements faits par les armées combinées, lors du siège de Toulon, en 1793, dans le domaine de notre père, situé près de la ville, et où elles avaient établi leur camp et leurs batteries.

FAITS

Feu Laurent Caire, notre auteur, était (et nous ne sommes ici que les échos de la voie publique) un négociant riche et des plus considéré de Toulon. Il possédait dans les environs de cette ville un domaine important que, depuis plus de 20 ans, il se plaisait à embellir, et qui, par sa position, dominait la ville et la mer.

Les armées coalisées qui, en 1793, comme en 1815, combattaient pour le maintien de la légitimité et pour le rétablissement de Louis XVII sur le trône de France, choisirent ce domaine, et principalement la forêt, dont la position était si favorable pour la défense, afin d’y établir leur camp et les redoutes appelés Mulgraw, le grand camp, celle dite Balaguier, ainsi que leurs batteries.

Tous les arbres de la forêt, les arbres fruitiers, toutes les provisions, les récoltes, tous les objets servant à l’exploitation du domaine, furent pris, employés aux fortifications, au chauffage et à la consommation de l’armée. Toutes ces dévastations furent l’effet de la force majeure. Ce qui les rendit encore plus désastreuses, c’est que M. Caire, absent, ne put protéger ni défendre sa propriété. Il venait d’être nommé commissaire avec M. Pernetty, par toutes les autorités et les sections de la ville de Toulon, dans le but de négocier, en son nom et pour le Roi de France, avec l’autorisation et l’intervention des commandants et amiraux des armées alliées, un emprunt d’un million de piastres pour faire face aux dépenses urgentes que commandait la position de la ville. L’on transcrit ici les quatre pièces officielles relatives à cet emprunt (Pièces jointes de n°1 à 4). Il en résultera pour vous, Messieurs, comme vérité incontestable, que les armées alliées devant Toulon ont agi, au nom de Sa Majesté Louis XVII, et dans l’unique but de la rétablir sur le trône de ses pairs ; et, comme conséquence, que les torts éprouvés, les dommages causés au sieur Caire, pour la même cause et dans la même vue, doivent être remboursés par le Gouvernement français.

Cette mission honorable, mais dangereuse, causa sa ruine et la nôtre par la confiscation et la vente de tous nos biens.

Nous sommes victimes comme tant d’autres Français : nous ne nous en plaignons pas ; mais nous intéresserons votre justice, quand vous saurez que notre réclamation actuelle est la seule chose que nous ayons sauvée du naufrage d’une belle fortune, et quand vous réfléchirez que le capital, dû depuis vingt-quatre ans, n’en est payable qu’en valeur de l’arriéré et sans intérêt.

Avant de recourir à votre sagesse, Messieurs, et pour ne pas dérober des moments si utiles à la chose publique, nous avons fait diverses tentatives, toutes infructueuses, et dont il est indispensable de vous rendre compte, puisque c’est par suite des renvois que nous avons éprouvés, que nous sommes contraints de nous adresser à vous.

D’abord M. Panon, qui, comme mon père, avait fait en 1793 des fournitures aux alliés devant Toulon, s’adressa au Gouvernement anglais pour le remboursement d’une somme de 15,070 francs, qui lui étaient due par pièces authentiques. Il reçut, le 27 novembre 1816, des bureaux de la Trésorerie de Londres, la lettre dont nous joignons copie (Pièce jointe n°5), et qui le renvoie au Gouvernement actuel de France, au nom duquel Toulon avait été occupé par les armées combinées.

Nous nous trouvons absolument dans le même cas, et dans une position plus favorable encore, puisque c’est de fournitures librement faites qu’il réclame le remboursement, et que nous demandons le prix de dommages soufferts par l’effet de la contrainte et de la force majeure. Nous ne pourrions donc obtenir une réponse différente : voilà de la part du Gouvernement anglais un déni de justice, un refus de paiement.

Le 31 octobre 1816, nous nous adressâmes à la commission mixte des créances anglaises et françaises, établi à Paris en vertu du traité de paix, et fournîmes des pièces à l’appui de notre demande. Le 14 novembre suivant, nous en fîmes remettre une supplétive avec un bordereau, duquel il résultait que la créance se portait à 209,0 54 fr. 10 c.

Le 28 novembre, nous reçûmes une réponse qui porte : « Que la commission n’étant instituée que pour liquider et reconnaître les créances dont les sujets anglais sont porteurs sur le Gouvernement français, elle n’a ni attribution ni pouvoir pour connaître des réclamations que des français peuvent avoir à exercer contre le gouvernement anglais, et nous invite à nous adresser à l’autorité compétente. » (Pièce jointe n°6)

Dans cet état de choses, et repoussés de tous côtés, par une supplique du 24 septembre dernier, antérieure à l’expiration du délai accordé aux créanciers de l’État, nous eûmes recours au Ministre des Finances, auquel furent produites les pièces, la copie du mémoire à la commission, et celle de la réponse du Gouvernement anglais à la supplique de M. Panon. Nous reçûmes le 21 octobre suivant une lettre de laquelle il résulte qu’il n’a été pris aucune mesure pour le paiement des créances de cette nature ; qu’il n’existe aucun crédit sur lequel ils puissent être assignés, et que Son Excellence nous témoigne ses regrets de n’avoir aucun moyen de s’occuper utilement de l’objet de notre réclamation. (Pièce jointe n°7)

Vous daignerez remarquer, Messieurs, que Son Excellence ne pense pas avoir des moyens pour contester nos droits. Elle se borne à dire qu’elle n’a aucun crédit ; que le budget n’y a pas pourvu. Dans cette position, nous avons dû examiner si nous formerions un pourvoi au Conseil d’État, de l’autorité duquel ressort le ministre ; mais un peu de réflexion nous a fait penser qu’il était incompétent dans l’espèce ; qu’il était hors de sa puissance d’ouvrir des crédits au Ministre, de faire comprendre dans le budget telle ou telle nature de créances ; que vous seuls étiez investis, par la loi et la Charte, du droit de décider sur cette matière, puisqu’à vous seuls était réservé le droit de voter l’impôt.

Ces points de fait, sur lesquels il n’est pas permis de lever le moindre doute, une fois constans, nous allons essayer de résoudre les deux questions de droit, posées en tête de la supplique.

Première question

Un tort souffert par un français, victime de la force majeure, mais dont le but légalement démontré a été de la part de ses auteurs de coopérer au rétablissement de Sa Majesté Louis XVII, sur le trône de ses ancêtres, constitue-t-il en sa faveur une créance qui doive être considérée comme une dette de l’État ?

Il semble que proposer cette question, c’est la résoudre.

En effet, s’il vous est démontré, Messieurs, par les pièces dont les copies sont jointes au mémoire, et dont les originaux sont en notre pouvoir, que les armées combinées et alliées devant Toulon, n’ont agi que dans la vue de rétablir l’ordre en France ; de faire succéder la légitimité à l’anarchie ; de replacer Louis XVII sur son trône ; si l’emprunt d’un million de piastres, votée par la ville, au nom du Roi, avec la garantie des armées coalisées n’a pas eu d’autre cause ; il devient incontestable que les préjudices causés, les dévastations commises par cette même armée pour la défense de Toulon, par la voie de la force concourant au même but, doivent avoir le même principe, la même origine, la même nature. Elles ont été faites avec la tâche de l’autorité légitime du Roi, et son Gouvernement doit les garantir, les reconnaître et les acquitter. Si le succès eût couronné les efforts des alliés ; si, par suite de ce mouvement donné aux véritables français, le drapeau blanc eût flotté dans tout le royaume ; si, avant ou après la mort de l’infortuné Louis XVII de glorieuse mémoire, Sa Majesté Louis XVIII, lors régent, puis Roi de France, fut remonté sur le trône de ses ancêtres ; si ce noble dévoûment enfin eût sauvé la France des déchirements et des secousses qui l’ont ensuite si cruellement et si longtemps agitée ; aurait-on mis en question, si le gouvernement devait acquitter une dette aussi sacrée que celle résultante de ces dégradations ? La reconnaissance publique eut environné les auteurs immortels de ce hardi projet et de ceux qui l’avaient secondé ; la France entière les eût salués du nom de libérateurs, et ses trésors prodigués, n’eussent que faiblement payé la tête d’un peuple généreux et juste. Sa Majesté Louis XVIII qui nous est heureusement rendue. Cette dette est la sienne, puisque c’est en son nom comme Régent, qu’elle a été forcément contractée. Peut-on se permettre d’élever un doute sur la question de savoir si vous, Messieurs, les dignes représentants d’un peuple auquel il s’identifie par son amour, hésiteraient à la reconnaître comme créance de l’État ? Et lorsque la munificence nationale dont vous avez été les provocateurs et les organes, a voulu payer les dettes particulières de son Roi, lorsque toutes les créances, même celles contractées pendant les cent jours, ont trouvé grâce devant ce grand principe de magnanimité, d’union et d’oubli qui caractérisent le Gouvernement et son chef, une dette qui porte tous les caractères de dette publique, d’un tort souffert dans un intérêt général, dont la cause est si noble et si sacrée, dont les créanciers ont souffert tant de maux et de persécutions, dont le Roi de France enfin est le garant tacite, mais formel, serait repoussée par vous ! Non, Messieurs ; nous n’avons pas même conçu cette pensée ; elle levait un doute sur ce point, ce serait outragé vos sentiments et vos principes, et nous ne devons trouver dans votre enceinte que des oreilles disposées à nous entendre, des cœurs prêts à nous accueillir.

Et quand la loi si juste, si rassurante du 28 avril 1816, a voulu, par son art. 12, que tous les créanciers de l’État fussent payés ; lorsque nous avons fait notre réclamation avant l’expiration du délai fatal, assigné par la loi du 25 mars dernier ; lorsqu’elle a été formée dans le seul temps où elle était possible, pourrait-on nous opposer quelque loi de déchéance ? Mais la déchéance est une peine infligée à la négligence ; pour la subir, il faut avoir eu indispensablement la possibilité de l’encourir, la puissance, la faculté de l’éviter et de s’y soustraire : nous n’avons eu ni l’une ni l’autre.

Et on le demande, est-ce sous les gouvernements révolutionnaire et républicain que nous pouvions demander le remboursement d’une créance contractée pour renverser les républicains et les anarchistes ? Est-ce sous le gouvernement impérial que nous pouvions demander à Buonaparte le paiement d’une dette faite par des armées en guerre contre lui, et dont le but était de faire reconnaître l’autorité de Louis XVII, sur le trône duquel il s’était si imprudemment assis ?

C’est sous le Gouvernement du Roi légitime seul que nous avons pu nous faire entendre ; c’est à dater uniquement de son fortuné retour en France, qu’une loi de déchéance rendue par lui (celle résultante de la loi du 25 mars dernier, par exemple) et à laquelle nous aurions négligé de nous soumettre, aurait pu nous atteindre.

Ne serait-il pas étrange, Messieurs, qu’ont vint opposer aux créanciers de Sa Majesté et des Princes de sa Maison, qui ont été ou doivent être payés sur les trente millions votés par vous, les lois de déchéance antérieures à leur retour ? Or, notre position est la même. Nous ne pouvions demander notre paiement que sous le règne des Bourbons, comme ils ne pouvaient réclamer le leur qu’auprès du Roi de France, rétabli sur le trône de ses pairs ; et ce n’est pas sous le Gouvernement juste et paternel qui nous a été si heureusement rendu, que de tels moyens pouvaient nous être proposés, non, Messieurs, et nous croyons avoir résolu positivement la première question.

Il nous reste la seconde, et cette tâche sera moins pénible encore que la première.

Deuxième question

Quand la loi est muette, quand les Ministres de Sa Majesté n’ont aucun crédit assigné dans le budget pour faire face à une dépense, n’est-ce pas à vous seuls, Messieurs, appelés à voter l’impôt, qu’il faut avoir recours pour y suppléer ?

Aux termes de l’art. 48 de la Charte constitutionnelle, « aucun impôt ne peut être établi ni perçu, s’il n’a été consenti par les deux Chambres et sanctionné par le Roi. – Art. 49. L’impôt foncier n’est consenti que pour un an. »

Nous avons prouvé 1° que notre créance est une dette de l’État, et vous avez été convaincus qu’aucune loi de déchéance, autre que celle du 25 mars dernier, dont nous nous sommes garantis par une demande à Son Excellence le Ministre des Finances, ne peut nous être applicable.

2°. Nos réclamations parvenues à la commission mixte, elle s’est déclarée incompétente. M. Panon, dans une position identique et moins favorable, s’est pourvu auprès du ministère anglais qui l’a renvoyé au Gouvernement français comme débiteur de cette créance, contractée dans son seul intérêt. Enfin, nous avons eu recours au Ministère des Finances qui, sans nous opposer aucun obstacle, sans contester nos droits, nous a témoigné ses regrets et s’est déclaré incompétent, attendu qu’il n’existe aucun crédit sur lesquels notre créance puisse être assignée ; ce qui a dû tracer notre marche et nous indiquer que le conseil d’État, ne pouvant pas assigner un crédit ni statuer sur le budget, notre recours à lui serait illusoire.

Nous avons donc épuisé tous les moyens qui pouvaient sauver au Gouvernement français le paiement du prix des pertes qu’a essuyées notre père. Dans l’impossibilité démontrée d’y parvenir, nous nous sommes adressés au Ministre français, qui seul pouvait faire droit à notre demande ; et c’est sur son refus et l’indication des causes qui l’ont motivé ; l’impuissance où il était de prononcer ; c’est enfin sur la voie qui nous a indirectement signalée, et qui se trouve plus positivement tracé dans la Charte, que nous avons dû nous adresser à votre autorité, seule compétente dans l’espèce, puisque la loi se tait, que les Ministres sont sans pouvoir, et que fidèles aux principes, ils ne veulent pas prendre l’initiative sur des questions dont la solution est exclusivement réservée par les lois à la sagesse de vos délibérations.

Nous croyons avoir rempli notre tâche ; l’accomplissement de la vôtre comblera nos vœux, signalera votre impartiale justice, assurera le triomphe des principes consacrés par la Charte, et portera la consolation et l’espérance dans l’âme des vrais Français, qu’aucun sacrifice, aucune crainte, aucun appât n’ont pu faire dévier du chemin qu’ombragea toujours le panache blanc d’Henri IV.

À ces causes, nous supplions qu’il vous plaise, Messieurs, ordonner que, dans le budget qui va être soumis à la sagesse de vos délibérations, un crédit soit ouvert au ministère de la guerre ou des finances, pour faire face à l’acquittement de la créance de 209,054 fr. 10 cent., prix des dégradations et dommages soufferts par le sieur Caire, dont nous réclamons le remboursement, sans qu’aucune loi de déchéance puisse nous être opposée ; qu’en conséquence, la créance qui en résultera après règlement, sera comprise au nombre de celles indiquées par les lois du 28 avril 1816 et 25 mars 1817, à la charge par nous de justifier de nos titres et de nos droits audit remboursement auprès du Ministre qui devra connaître de cette liquidation ; et ce dans les formes voulues et autorisées par les lois.

Les héritiers Caire,

Paris, 15 décembre 1817.

  1. S. Au moment de l’impression, nous lisons dans le rapport de Son Excellence le Ministre des Finances, fait ce jour à la Chambre, que l’arriéré dû aux créanciers français, se porte à 427 millions qu’on peut réduire à 400, dont 50 sont réservés au paiement de l’arriéré de 1809 et de ceux antérieurs. C’est dans cette dernière classe, sans doute, que votre sagesse ordonnera de ranger notre créance, et sur le fonds de 50 millions qu’elle en assignera le remboursement.

N°1. Extrait du registre des délibérations et arrêté du comité général des sections permanentes de Toulon.

Session du 12 septembre 1793, au matin, l’an 1er du règne de Louis XVII.

Vu le mémoire fourni par les sieurs Fournier et Panisse, présentant des vues sages sur l’état des finances et la manière d’en prévenir la ruine totale, et ouï sur ce les observations de différents membres.

Le comité général considérant que l’urgence des circonstances, l’état de détresse où se trouve la ville de Toulon, la pénurie des moyens et l’impossibilité de pourvoir à ses besoins pressants, doivent exciter son attention et ses sollicitudes ; considérant encore que le discrédit énorme des assignats qui menacent la ruine de la fortune publique, et le refus de ce papier discrédité et totalement méprisé, mettant la plus grande partie des habitants dans la dure nécessité de ne pouvoir plus se substanter, porterait le comble à nos mots, si l’on ne prenait des moyens prompts et efficaces pour parer à tous ces inconvénients ; considérant enfin qu’un tel état de choses bien propre à alarmer et jeter le découragement dans tous les esprits, nécessite les mesures les plus absolus :

Arrête, après une longue discussion, les dispositions suivantes :

  • Qu’il y a lieu à faire un emprunt ;
  • Que l’emprunt sera borné à un million de piastres ;
  • Qu’il sera fait au nom du peuple toulonnais et pour le Roi ;
  • Que l’emprunt sera fait à Gênes, Rome, Livourne, et autres lieux où besoin sera ;
  • Que cet emprunt aura pour hypothèque, tous les domaines nationaux, royaux et publics, tant de terre que de mer, de la ville de Toulon et ses dépendances, lesquels domaines sont garantis par la protection des puissances coalisées.

Séance du 12 septembre susdit, au soir.

Le comité général a arrêté qu’il sera envoyé une députation de deux membres à Gênes, Livourne, ou dans tous les autres lieux où besoin sera, pour l’emprunt d’un millions de piastres qui a été délibéré aujourd’hui, et que le tout sera auparavant référé aux amiraux anglais et espagnols.

Et à l’expédition présentée aux sections, au pouvoir du comité, se trouvent les adhésions des huit sections de la ville de Toulon, en date du 16 septembre susdit, dans lesquelles les sections 2, 5 et 6 réunis, 7, 8 ont exprimé leur vœu, de s’adresser, pour obtenir l’emprunt, à l’agent du Régent de France, à Gênes, ainsi qu’à ceux des puissances coalisées, étant assurés qu’ils faciliteront je ledit emprunt.

Certifié conforme aux originaux par Nous, Président et Secrétaires du Comité général,

  1. Barat, Président, Lesperon, Vice-Président,

Mélisan, Secrétaire, Branzon fils, Secrétaire.

N°2. Extrait du registre des délibérations et arrêtés du comité général des sections prenantes de Toulon.

Séance du 16 septembre 1793, l’an 1er du règne de Louis XVII.

La question sur la nomination des deux commissaires qui doivent être chargés d’aller faire l’emprunt de 5 millions dans les pays étrangers, ayant été agité ;

Le comité général, considérant qu’il est urgent de procéder à la nomination desdits commissaires, a arrêté que le choix en serait fait par la voix du scrutin, et de suite de scrutins ayant été ouvert, et le dépouillement fait, il en est résulté que sur trente votants, Messieurs Pernetty et Laurent Caire ont réuni la pluralité relative des suffrages.

En conséquence le comité arrête que cette nomination sera tout de suite référée aux sections, pour donner leur approbation.

Et au bas de l’expédition présentée aux sections, au pouvoir du comité, se trouvent les adhésions des huit sections de la ville de Toulon, en date du 16 septembre susdit, par lesquels les sections 5 et 6 réunies et 7, invitent les susdits commissaires d’agir de concert avec les agents des puissances coordonnées et de Monsieur.

Certifié conforme aux originaux, par Nous, Président et Secrétaires du Comité général.

Reboul, Président, Mélizan, Secrétaire,

Branzon fils, Secrétaire, J. Louis Panisse, Secrétaire

N°3.

L’an 1793, le premier de la régénération de la monarchie française, et du règne de Louis XVII, et le 24 septembre avant midi, par devant Nous, notaires royaux à Toulon, recevant conjointement dans les mains courantes respectives des sieurs Lesperon et Reboul, nos confrères, et en présence des témoins soussignés, ont été présents en personne, MM. L.-H. Giraud, président, et L. Mouton, secrétaire de la section n°1. Commissaires nommés de ladite section, par délibération du 20 avril du courant, MM. J.-B. roux, président, et F. M. Prat, secrétaire de la section n°2. Commissaires nommés par icelle, par délibération du même jour, MM. J.-S. Belletre, président et E. Allègre, secrétaire de la section n°3. Commissaires nommés par icelle, par délibération du même jour, MM. F. Barrallier, président, E.-D. Augiot, vice-président, A. Guez, vice-président, J.-M. Camate, B. Guérin et J.-C. Bouisson, ces trois derniers, secrétaires de la section n°4, et commissaires nommés par elle, par délibération du 21 du courant, MM. P. Court, président, S. Foucon père et J. Foucon fils, secrétaires de la section n°5. Commissaires nommés par elle, par délibération du 22 du courant, MM. J.-F. Gaston, président, L.6J. Monnoyer, fils ainé, et P.-F. Pauquet, fils ainé, secrétaires de la section n°6. Commissaires nommés par elle, par délibération du 22 du courant, MM. F. Brun, président, et F. Panon fils, secrétaires de la section n°7. Commissaires nommés par elle, par délibération du 22 du courant, MM. L.-V. Simony cadet, président, et J. Olivier cadet, secrétaire de la section n°8. Commissaires nommés par elle, par délibération du 20 du courant, MM. F. Reboul, notaire royal, président du Comité général, J.-B. Lesperon, aussi notaire royal, vice-président dudit Comité, etc., tous composant le Comité général des Sections. MM. J.-A. Bonnegrace, L. Marcel, J. Dejean, M. Vidal, J.-A.-M. Possel, J.-M. Fournier, F. Richaud, L. Barthélémy, F.-Y. Fabre, B. Ferry, J. Gairord, J. Aréne, L. Bonnefoy, F.-A. Davant, et J.-F. Fauchier secrétaire général, composant l’administration provisoire du département du Var ; M. C. Vialis, président, etc. composant provisoire du district de Toulon, et MM. P.-J. Meyffrun, président, P. Chautard père, etc., composant la Municipalité de cette dite ville, et tous ensemble représentant la cille de Toulon, lesquels en cette qualité, en exécution de l’arrêté  pris par le Comité général des sections, le 12 du courant, adhéré par toutes les sections en conformité d’icelui, et encore de la nomination faite par ledit Comité général, le 16 du courant, également acquiescé par toutes les sections, ont donné pourvoir à MM. J.-A.-L. Pernety, ancien Payeur-général de la Marine, et L. Caire, négociant, tous les deux de cette ville, commissaires nommés de pour et au nom du peuple toulonnais, et pour le Roi, emprunter à gênes, Rome, Livourne et autres lieux où besoin sera, un million de piastres fortes, sous l’intérêt ou change, et sous les pactes, clauses et conditions les plus avantageuses, traiter à cet effet, tant pour le taux de l’intérêt que pour le terme du paiement, donner pour hypothèque de cet emprunt, des domaines nationaux royaux et publics, tant de terre que de mer de la ville de Toulon et ses dépendances, ensemble l’arsenal dudit Toulon, ainsi que les vaisseaux et tout ce qui en dépend, sous la garantie de leurs Excellences les Amiraux anglais et espagnol, passer tous actes d’obligations, par devant tous officiers publics avec les formalités de droit et d’usage dans les pays où l’emprunt sera fait, passer aussi tous actes d’assurances et au meilleur avantage possible pour la sûreté du transport du susdit million de piastres fortes, et généralement faire tout ce qui pourra leur paraître utile et le plus convenable, et de même suite ont été présents en personne leurs Excellences milord S. Hood, commandant l’armée de Sa Majesté britannique, et don Juan de Laugara, commandant l’armée de Sa Majesté catholique, lesquels pour et au nom des rois d’Angleterre et d’Espagne, donnent pouvoir auxdits sieurs Pernety et Caire, commissaires nommés de pour eux et en leurs noms respectifs, garantir le susdit emprunt d’un million de piastres fortes, contracter à cet effet tous engagements, sauf le recours de leurs souverains, sur les hypothèques ci-dessus désignées, et sous la condition que les fonds empruntés seront adressés et expédiés à leurs Excellences les Amiraux respectifs, pour plus grande sûreté, attendu les circonstances, lesquels fonds seront délivrés à fur et mesure des besoins sur les reconnaissances qui en seront données par la ville de Toulon, signer tous actes authentiques, remplir toutes les formalités de droit, le tout sous promesse de la part des constituants, de faire approuver, ratifier et confirmer par la ville de Toulon, tout ce qui sera fait et géré par lesdits sieurs commissaires, en vertu des susdits pouvoirs, et de les relever et garantir de toutes charges, requérant actes valables, nonobstant surannation et jusqu’à expresse révocation. Concédé, fait et publié dans la maison du sieur Saquy, sise sur le port, dans laquelle le Comité général tient ses séances, et ensuite dans le bord respectif de chaque Amiral de la rade de cette ville où nous nous sommes exprès portés en présence des sieurs A.-B. Brun Boissière, anciens trésorier des vivres de la Marine, et G. Puel, commis au bureau des subsistances, demeurant audit Toulon, témoins requis et soussignés, avec les constituants, à l’exception desdits sieurs Péne et Astier, qui ont déclaré ne savoir écrire, de ce enquis par lesdits notaires ; enregistré à Toulon, le 26 septembre 1793, l’an 1er du règne de Louis XVII du nom, reçu 3 livres en trois articles. Signé le blanc, à la minute.

Lesperon, notaire ; Reboul, notaire ; Verguin, notaire ; Silvestre

Nous A. Turc, président du tribunal du district de cette ville de Toulon, département du Var, de certifions et attestons à tous qu’il appartiendra, que les sieurs Verguin, Lesperon, Reboul et Silvestre, qui ont signé l’extrait de la procuration écrite aux précédentes pages, sont notaires royaux audit Toulon ; aux écritures et seings desquels pleine et entière foi doit être ajoutée tant en jugement que hors, en témoignage de quoi nous avons signé les présentes, munies du sceau du tribunal, et contresignées par le greffier. À Toulon, ce 26 septembre 1793, l’an 1er du règne de Louis XVII. Turc.

Noi, Luigi Fauchier, vice console du Sua Maesta il Re di Sardegna, in questo presente porto di Tolone,

Attestiano a chiunque spetta qualmente l’Illustrissimo Signore Turc, che ha firmato que dietro è tale e quale si dice, presidente des tribunale civile di questa presente citta, alle dieui firma e scritture da noi pienamente conosciute, si da pieno credito in judicio et extra; ed in fede concediamo il presente firmato da nostro proprio pugno et corroborato col solito sigillo reale di questro vice consolato. Dato in Tolone, a di vinti sei settembre 1793. Fauchier

Noi, Luigi Fauchier, vice console du Sua Altezza Reale il Serenissimo Gran Duca di Toscana, in questo presente porto di Tolone,

Attestiano a chiunque spetta qualmente l’Illustrissimo Signore Turc, che ha firmato qui dietro, è tale e quale si dice, presidente des tribunale civile di questa presente citta, alle dieui firma e scritture da noi pienamente conosciute, si da pieno credito in judicio et extra; ed in fede concediamo il presente firmato da nostro proprio pugno et corroborato col solito sigillo reale di questro vice consolato. Dato in Tolone, a di vinti sei settembre 1793. Fauchier

Noi, Luigi Guillani, Maggiore d’infanteria della serenissima Republica di Genova, e suo console in questo porto e citta di Tolone :

Facciamo piena ed indubitata fede a chiunque spetta qualmente l’Illustrissimo Signore Turc, che ha autentuato et firmato il retroscritto allo è presidente des tribunale civile di questa citta, tale quale si dichiara; e che alle di cui firme e scritture in detta qualita, pino credito si da in giudizio et fuori, ed in fede habbiamo fatto il prensente solto scritto di nostro proprio pugno, a corroborato col solito sigillo di questo consolato di Genova. Dato in Tolone, a di 26 settembre 1793. L. Guiliani

N°4. Les amiraux etc., des armées navales coalisées.

Au nom des puissances dont nous commandons les forces navales dans la Méditerranée, réunis pour protéger en France le rétablissement de l’ordre, y faire succéder le gouvernement monarchique à l’anarchie, voulant donner aux toulonnais qui les premiers se sont montrés fidèles à l’autorité légitime, et leur Roi Louis XVII, la preuve de la bienveillance de nos Cours, et l’assistance qui leur est nécessaire ; déclarons garantir formellement par ces présentes l’emprunt d’un million de piastres, aux taux et conditions qui auront été stipulés par MM. les députés de la ville de Toulon, pour gage duquel emprunt la ville de Toulon, au nom du Roi Louis XVII, affectent et hypothèquent tous les domaines nationaux et royaux de ladite ville et ses dépendances, l’arsenal et les vaisseaux, jusqu’à concurrence de la valeur dudit emprunt.

Prions et requérons les Ministres, Consuls et Agents de nos dites Cours respectives à Gênes, Livourne, Rome, Naples, Florence, et autres lieux, de reconnaître faire reconnaître, MM. Jacques-Antoine-Louis Pernety, ancien trésorier général de la Guerre et de la Marine française, et Laurent Caire, négociant de la ville de Toulon, en qualité de députés nommés pour ledit emprunt, de leur donner et faire donner tout crédit, de leur procurer protection aide et secours, et de leur accorder tous les témoignages d’affection dues aux Alliés.

Donner un bord des vaisseaux respectifs des Amiraux des armés coalisées mouillés à la rade de Toulon, ce vingt-septième de septembre 1793.

Langara, Hood

Don Manuel de Silva, y Excocia, Commisario de Guerra de los Reales Exercitos de S. M. Catholica, y su Consul general en los mares de Toscana :

Certifico, como la sobre scripta firma es de proprio puno, y caracter del Excellentissimo Senor Don Juan de Langara, Genera de la reale armada de S. M. Catholica, y afinque conste donde combenga, doy el presente firmado de mi mano, y sellado con el sello de las reales armas. Lliorna, a 29 de marzo, de 179 y quatro. Manuel de Silva

John Udny, Esq. His britannish Majesty’s Consul general for the city ans port of Leghorn in his royal Highness the Archduke great Duke of Tuscany dominions, certifies into all whom it may concern that the above firm is the hand writting of the right honourable Lord Amiral Hood to as well known, and towich all faith os to be given in any court and thereout.

In witness whereof ca have hereto set our hand and our consulat seal at Leghron this 31 day of march 1794.

John Udny, Consul general

N°5. Copie traduite de l’anglais, au bureau général de la traduction des langues, rue Neuve des bons Enfants, n° 37.

Sont obligés de laisser l’examen et la reconnaissance de votre réclamation au gouvernement actuel de France, au nom duquel Toulon a été occupé par les forces combinées.

Je suis, Monsieur, votre obéissant serviteur.

Signé Bureaux de la Trésorerie, le 27 novembre 1816

A M. Parson, Greek St Joho Square, n°29

Je soussigné, interprète juré près la Cour de Cassation, la Cour royale, le Tribunal de première instance, le Tribunal de commerce, etc., certifie la présente traduction fidèle et conforme à l’original en langue anglaise qui m’a été présenté, et que j’ai rendu après l’avoir signé et paraphé ne varietur.

Paris le 11 juin 1817.

Signé Frédéric Lameyer

N°6. Commission royale. Liquidation des créances anglaises.

Paris, 28 novembre 1816.

Monsieur,

La commission chargée, en vertu de la convention du 20 novembre 1815, de la liquidation des créances des sujets de S. M. Britannique envers le Gouvernement français, a reçu les mémoires et pièces concernant la réclamation de M. Louis Laurent Caire fils, de la ville de Toulon, que vous lui avez fait l’honneur de lui adresser le 14 novembre.

La commission après avoir pris connaissance de toutes les pièces, regrette, Monsieur, de ne pouvoir satisfaire aux désirs que vous manifestez, n’étant institué, au terme de la convention précitée, que pour liquider et reconnaître les créances dont les sujets anglais sont porteurs sur le Gouvernement français, elle n’a ni attribution du pouvoir pour connaître des réclamations que des Français peuvent avoir à exercer envers le gouvernement anglais.

En conséquence, en vous faisant le renvoi des pièces que vous lui avez fait parvenir, elle ne peut que vous invitez à vous retourner vers l’autorité compétente.

Nous avons l’honneur de vous saluer, Monseur, avec une considération très distinguée.

Les commissaires du Roi pour la liquidation des créances anglaises.

Lechat, Ramond

N°7. Ministère des Finances, département de la dette inscrite, bureau central.

Paris, le 21 octobre 1817

Le premier Commis des Finances, à M. Jousselin, avocat aux Conseils du Roi et à la Cour de Cassation, rue Thibautodé, n° 10, à Paris.

Le ministre, Monsieur, a reçu, avec la pétition que vous lui avez adressée le 24 septembre dernier, au nom de M. Louis Laurent Caire, fils de Laurent Caire, négociant à Toulon, les pièces constatant qu’il lui serait dû une somme de 204,054 fr. 10 c. Pour les  fournitures exigées par les Anglais, lors du siège de Toulon, en 1793, agissant au nom de Sa Majesté Louis XVII.

Son Excellence m’a chargé de vous informer qu’il n’avait été pris aucune mesure pour le paiement des créances de cette nature ; qu’il n’existait aucun crédit sur lequel il pût être assigné, et qu’elle ne pouvait, en conséquence, que vous témoignez ses regrets de n’avoir aucun moyen de s’occuper utilement de l’objet de cette réclamation.

J’ai l’honneur, M., de vous saluer.

Signé Harmand

Notes et références

Dossier C//2030 aux Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine

Réponse de M. Cogolin sur les indemnités des Emigrés pour les hoirs Caire – 23 novembre 1824

Toulon le 23 novembre 1824

Je réponds à la lettre dont vous m’avez honoré le 19 du courant ; j’ai consulté M. votre cousin Alexandre1 sur les démarches que j’avais à faire pour établir au nom des hoirs Caire2 la réclamation relative à l’indemnité.

Son opinion particulière et que jusqu’à ce que la loi sur l’indemnité à accorder aux émigrés soit rendue, il n’y a absolument rien à faire.

J’avais entendu parler des inscriptions prises sur les propriétés de M. Sicard3, ancien trésorier des Invalides ; mais le produit de ces propriétés, vendues par une expropriation forcée, ayant été insuffisant pour payer les créanciers inscrits avant les hoirs Caire, Mme votre belle-mère4 qui était représentée par M. Coulomb, avoué, ne put rien recevoir sur le produit de ses ventes.

Je pense au reste que, soit que les biens spoliés à M. votre beau-père5 soient inscrits sur le tableau, soit qu’ils ne le soient pas, les héritiers ne sont pas moins en droit de réclamer l’indemnité parce que l’événement qui a donné lieu à la perte de ses biens est l’entrée dans Toulon des troupes étrangères. C’est un événement de force majeure dont M. votre beau-père ne pouvait être garant.

S’il pouvait m’être permis de farfouiller dans les archives de la marine il serait possible que je parvienne à démontrer que le prétendu déficit n’existait pas, et que les fonds affectés à cette caisse avaient été employés à un autre service. Ce qui est dans l’état de pénurie où l’on se trouvait à Toulon à cette époque pouvait se pratiquer. Ne l’a-t-on pas fait ainsi avant la première restauration et dans les 100 jours ?

Si l’administration de la marine se faisait un plaisir de fournir des renseignements aux émigrés comme le fait votre administration des domaines, on pourrait facilement éclaircir provient ce déficit.

Bien que je ne puisse agir envers l’administration de la marine que d’une manière indirecte, lorsque le moment sera arrivé de faire des demandes, aidé des conseils et de l’influence de M. votre cousin, je ne négligerai rien pour faire admettre ladite réclamation.

Notes et références

  1. Alexandre Aguillon
  2. Les hoirs Caire sont : Victoire Caire, épouse de Paul Guigou, Eugénie Caire, Honorine Caire, épouse de François Mille, et Louis Laurent Caire
  3. Jean Sicard
  4. Alexandrine Victoire de Lespine du Planty, épouse de Laurent Caire
  5. Laurent Caire

Lettre à M. Cogolin sur les indemnités des Emigrés pour les hoirs Caire – 19 novembre 1824

Marseille 19 novembre 1824

Le Gouvernement, dans la vue d’indemniser les émigrés, a fait dresser dans toutes les communes par les agents du Domaine, un état des confiscations qui ont eu lieu pendant le régime révolutionnaire ; il apporterait beaucoup aux enfants de M. Laurent Caire1 de savoir s’ils figurent sur ce tableau pour quelle somme.
Ils ont malheureusement des doutes à ce sujet ; leur père s’était rendu, pour une somme peu importante, caution de M. Sicard, trésorier des Invalides de la Marine ; sous ce prétexte on lui saisit et on vendit le 26 floréal an 22 , à des prix infiniment au-dessous de leur valeur, la majeure partie de ses maisons et campagnes ; ils craignent que cette perfidie ne les prive de toute participation au grand acte de justice que l’on va faire.
Vous êtes porteurs de leurs procurations ; en cette qualité veuillez bien prendre auprès de l’administration des domaines des renseignements que vous aurez la bonté de me transmettre ; de mon côté j’en ferai part à mon beau-frère Caire qui les attend avec impatience ; cette administration ici se fait un plaisir d’informer de ce qui les regarde tous ceux qui s’adressent à elle, il en sera ainsi j’espère de la vôtre.
Parlez-en à mon cousin, M. Alexandre Aguillon ; il ne peut manquer d’y prendre le plus vif intérêt ; il vous mettra au besoin sur la voie et suivant le cas où nous nous trouvons, il nous aidera de toute son influence.
On m’a dit dans le temps qu’en mars ou avril 1803, il fut pris hypothèque pour 100 M/L sur les biens de M. Sicard en faveur des hoirs Caire ; j’ignore absolument qu’elles en ont été les suites.

François Mille

Notes et références

  1. Les enfants de Laurent Caire sont : Victoire Caire, épouse de Paul Guigou, Eugénie Caire, Honorine Caire, épouse de François Mille, et Louis Laurent Caire
  2. Le 26 floréal an 2 correspond au 15 mai 1794. A cette date, les Caire sont à Livourne.

Lettre de Laurent Caire à Jean Abeille du 19 septembre 1790

Toulon le 19 septembre 1790

Monsieur,

Je viens profiter des offres de service que vous m’avez faites pendant votre séjour à Paris, pour une affaire qui en m’intéressant en particulier intéresse en même temps le Commerce et la Nation.

Vous trouverez ci-joint copie des lettres que j’ai écrites à Mr Meifrun1, notre député à l’Assemblée Nationale et à Monsieur Malouet qui m’est fort attaché ; j’y joins copie de toutes les pièces qui y ont rapport. Vous jugerez par le détail toutes les inquiétudes que j’ai eues et que je ne cesse d’avoir. Il est certains en droits publics de la ville où on ne cesse de me calomnier. Ma vie, ma fortune et celle de mes amis est dans le plus grand danger depuis le 24 juillet dernier et je ne saurais rallumer votre amitié et votre protection dans une circonstance plus intéressante. On cherche partout à favoriser le commerce, on cherche à attirer l’abondance, personne mieux que vous ne connait les devoirs d’un commissionnaire et les suites de l’effet d’une insurrection populaire pour l’objet d’une denrée de première nécessité appartenant à des étrangers ; quelle confiance peuvent-ils avoir en nous ? s’ils ne trouvent pas des protecteurs pour leur fortune quand elle sera dans nos ports ; que ne doit-on craindre dans des moments critiques ? Nous en avons un exemple récent : sans le Royaume de Naples et Sicile, la France aurait-elle pu subsister ? Peut-on se dissimuler les obligations que nous avons eues l’année dernière à ce Royaume ? Je ne fais que vous répéter ce que vous savez aussi bien que moi. On a voulu souvent m’opposer que les blés que j’ai en magasin ayant gagné la prime, je devais les vendre au prix courants, mois la valeur de la prime. Le Gouvernement a-t-il pu jamais entendre cela ? A-t-il jamais pu entendre de sacrifier les intérêts des Étrangers qui lui ont apporté des subsistances ? N’est-ce pas l’appât de la prime qui nous a procuré tant de blé, n’est-ce pas la grande quantité qui en avait fait baisser le prix au commencement et jusque vers le 20 juillet dernier ? Combien de réflexions n’aurait-on pas à faire encore ?

Voilà, mon cher ami, le fruit de mes actes, de mes soins pour acquérir une réputation. J’ai mérité la confiance des Étrangers, j’ai attiré l’abondance, je procure journellement le débouché des marchandises du pays et il est bien douloureux pour moi à la fin de ma carrière d’éprouver les dérangements auxquels je suis exposé.

J’ai l’honneur d’être avec la plus sincère attention, Monsieur,

Votre très humble et très obéissant serviteur

Laurent Caire

PS. Veuillez bien, mon cher Monsieur, vous joindre à messieurs de Malouët, Meifrun et Millet de Mureau pour délibérer sur mon affaire et voir les moyens les plus efficaces pour engager notre municipalité à rendre public ma conduite, ainsi que mes divers comparants l’en ont supplié et ce quelle n’a pas encore fait. J’attends avec impatience votre chère réponse2.

Notes et références

Source : Transcription de George Ladevie qui ajoute : (Voir dossier Foulchier / Fargier) Laurent Caire est soumissionnaire à Toulon. En 1832, son fils Louis Laurent devait épouser une fille du général Pascalis, mariage négocié par Jean Abeille. Plus tard, Henri, arrière-petit-fils de Laurent devait épouser [Marcelle] l’arrière-arrière-petite-fille de Jean Abeille.

  1. Pierre-Joseph Meyffrun ou Meifrun, né à Toulon le 23/02/1723, décédé à Toulon le 17/05/1814, député de l’Assemblée Constituante
  2. Une lettre ouverte du 7/08/1790, signée du Maire, Mr Richard, de quatre conseillers et de Mr Serres le jeune substitut dément formellement les bruits qui courent accusant Mr Caire d’accaparement des blés. La lettre doit être affichée.

Note sur la succession de M. Joseph Caire ensuivi celle de son épouse – 13 février 1824

L’usufruit laissé par Mr Joseph Caire ayant cessé depuis le 5 février 1824, époque du décès de son épouse, messieurs Aguillon frères et les hoiries de M. Laurent Caire sont appelés à recueillir, en leur qualité d’héritiers fonciers, la succession de M. Joseph Caire leur oncle. Cette succession se compose, d’après les pièces qui m’ont été remises, des créances ci-après détaillées.

créances en principal, par M. Joseph Guidon : 9 480
Portion dont les hoiries Caire ont été déclarées perdant par le jugement d’ordre : 790.25
Frais judiciaires payés à M. Lavoué Toucas à la charge de l’hoirie : 80
609.75
 2° créance due par M. Albert avocat représenté par M. Castelli dit Cafsian du 5 décembre 1732 notaire M. Minier à Toulon de 4000 réduites à 3 950.62
 3° portion de la créance des hoiries Doumet établie par acte du 22 août 1775 notaire Mège à Toulon 1 080
Sommes recouvrées par M. Alexandre Aguillon 13 640.37
 4° solde de la créance des hoiries Doumet établie par l’acte précité notaire Mège 1 120
 5° créance à constitution de rente au 5 p% due par les hoiries Lambert en son vivant greffier du tribunal de commerce de Toulon suivant l’acte du 9 janvier 1792 notaire Philibert à Toulon de la somme principale de 4000 assignation réduite à 2 880
créance à constitution de rente au 4 p% due par M. Joseph Barnabé Tournier ancien négociant à Toulon suivant l’acte du 21 février 1792 notaire Lesperon de la somme principale de 4000 également en assignation réduite à 2 880
 7° créance privée souscrite par M. Aguillon père du 1er septembre 1776 en faveur de M. Joseph Caire son beau-frère, à constitution de rente au 5 p% contenant l’obligation de M. Joseph Aguillon fils d’acquitter cette créance qui est avérée devant notaire et inscrite aux hypothèques et qui s’élève à la somme de  22 000
Total  42,280F.37C

M. Alexandre Aguillon a à tenir compte aux héritiers l’hoirie de M. Joseph Caire son oncle, des 13,640F et 37C recouvrés par lui de Messieurs Guison, Albert et hoirie Doumet.

Quant aux 28 640F provenant de divers titres de créances à constitution de rente, il n’y a absolument aucune formalité à remplir dans ce moment ; mais il est indispensable que Mademoiselle Eugénie Caire, ainsi que ses frères et sœurs envoyent chacun leur procuration, à l’effet de retirer les sommes dues tant en principal qu’en intérêts provenant de l’hoirie de feu Joseph Caire, d’exercer à défaut de paiement toutes formalités judiciaires, telles que de faire citer en conciliation devant tout juge de paix devant tous tribunaux compétents, plaider, défendre, opposer, obtenir tous jugements, les mettre à exécution, appeler, acquiescer à tout arrangement, transiger, intervenir dans toutes procédures qui seraient dirigées contre les débiteurs de ladite hoirie par voie d’opposition, ou autrement, du reçu de toute forme donner quittances et décharges valables, faire exproprier tout débiteur de ladite hoirie, consentir la radiation de toutes inscriptions hypothécaires, substituer en tout ou partie du procureur, les renvoyer en substitution d’autres etc etc

Par son testament mystique du 23 mai 1819 déposé le 19 janvier 1824 en l’étude de M. Sylvestre notaire à Toulon, Madame Claire Aguillon veuve de M. Joseph Caire a fait, entre autres dispositions, celles qui suivent.

« Je lègue et laisse à mes deux neveux Pierre et Alexandre Aguillon fils de François, la maison que je possède à Toulon rue Bourbon 105 N° 24 (nouvelle série) que j’ai entièrement fait reconstruire, il y a environ 11 ans, pour commencer d’en jouir d’abord après mon décès et en faire et disposer à leur plaisir et volonté, à la charge 1° de payer une pension viagère de 200F en faveur de M. Étienne Aguillon mon frère (Il est prédécédé). 2° de compter, après le décès de mon dit frère Étienne Aguillon cinq cents Francs à chacun des quatre enfants de feu M. Laurent Caire mon beau-frère ; ce qui fait deux mille francs pour les quatre, ou aux sœurs en cas de prédécès moyennant quoi les enfants Caire renonceront à toute prétention quelconque qu’ils pourraient avoir sur ladite maison avant que je la fisse rebâtir.

Je lègue de plus à Louis Laurent Caire négociant à Livourne, l’un des dits enfants Caire, une montre en or et une croix à diamants dite Grand Esprit qui lui seront remises par mon héritier après mon décès.

Dès que la délivrance de la maison aura été faite par le tuteur de l’héritière qu’est la fille de M. Pierre Aguillon fils de Joseph MM. les frères Aguillon compteront 500F à chacun des enfants Caire. »

Toulon le 13 février 1824.

Cogolin

Notes et références

Note sur la succession de Joseph Caire ensuivi de celle de son épouse

Laurent Caire est ruiné par la Révolution

À Son Excellence Monsieur le Chevalier Elliot ministre plénipotentiaire de Sa Majesté britannique en Corse.

Laurent Caire ancien propriétaire du domaine où fut la Redoute Mulegrave, prend la liberté d’exposer l’étendue de ses malheurs, et la perte totale de sa fortune. Il n’a pas la prétention d’en réclamer la totalité auprès des Puissances, mais il se flatte que leur générosité sera émue en jetant un coup d’œil sur le simple aperçu de la valeur des objets suivants.

Il avait dans l’étendue de son domaine de cent vingt et un mille deux cent quarante une cannes de terre complantées en bois, ce toisé est fait relativement à sa nouvelle imposition et l’article ne monterait pas à moins de cent dix huit mille livres ; au surplus il s’en rapporte à l’évaluation que tout expert pourrait faire. Cy…118.000

Il avait de plus soixante neuf mille trois cent dix huit cannes de terre complantées en vigne, olivier, figuier, mûrier, oranger, caprier et arbres fruitiers absolument dévastés, coupés ou arrachés ; il avait aussi des terres à la Garde et aux Sablettes. Ce dommage joint à celui des bâtiments et à la destruction des fontaines, conduites des eaux, des ustensiles de cave, du moulin à huile, des pressoirs, des tonneaux, et bestiaux, s’élève au moins à deux cent vingt cinq mille livres. Cy…225.000

La perte d’une fabrique de cordes pour les navires, établie à La Seyne pour occuper les pauvres ouvriers de tout âge, des marchandises en chanvre, goudron, savon et des ustensiles qu’elle contenait se monte au moins à cinquante sept mille livres. Cy…57.000

La perte des marchandises que sa femme n’a pu enlever de Toulon, en blé, vin, huile, savon, soye, siure, café, et autres divers articles qu’il avait en magasin, va à plus de soixante mille livres. Cy… 60.000

La perte totale du mobilier de la Campagne vingt six mille livres. Cy…26.000

La perte totale du mobilier de la ville, la garde-robe de sa belle-mère, celle de sa femme, peut s’évaluer à soixante dix mille livres. Cy…70.000

Il est à présumer que trois grandes maisons qu’il a à Toulon seront abattues, que ses maisons de campagne en huit ou dix bâtiments dont quatre surtout très considérables, déjà dévasté seront aussi détruits. Ces divers objets s’élèvent à mieux de cent quatre vingt mille livres. Cy…180.000

Il faut ajouter ses divers intérêts sur des navires, sur des édifices publics, sur des fermes, ses placements tels que ceux sur le Clergé, ses contrats, ses billets à ordre, un commerce qu’une longue suite d’années de travail et de bonne conduite avait rendu florissant. Il se borne à porter tant d’objets inappréciables à quatre cent mille livres. Cy…400.000

Les remboursements qu’on lui a fait accepter de force en assignats lorsqu’ils perdaient jusques à 80 %, tandis qu’il ne se permettait pas d’en user de même avec ses créanciers, lui ont fait un tort de cent vingt mille livres. Cy…620.000

Il attendait de son malheureux frère qui selon toute apparence a été perdu dans le désastre de Toulon près de trois cent mille livres. Cy…300 000

Total : 1.556.000 livres

La perte s’élève à plus d’un million et demi, et certainement les articles ne sont pas exagérés. Après une Révolution aussi désastreuse son ancre d’espérance était sa campagne qui seule aurait pu nourrir sa famille. Et l’on sait dans quel état à cette campagne est réduite. Il conservait ses bois précieusement pour en faire des coupes à feu et à mesure des besoins d’argent.

Son Excellence connait de quelle utilité ses forêts étaient aux anglais, ainsi que tous les arbres de sa terre, que s’il eût fallu porter au Camp tous les ustensiles et matériaux qui se trouvaient chez lui, les travaux eussent été plus longs et plus dispendieux.

Dans son désastre perdant tout jusques aux papiers de la plus grande conséquence, on ne lui a sauvé qu’un registre où ses créanciers sont inscrits pour environ quatre vingt mille livres parce qu’il s’est fait la délicatesse de les payer en assignats.

Il a auprès de lui Madame de L’Épine mère de sa femme qui est très âgée et très infirme, et qui n’a rien au monde pas même ses diamants, sa femme, trois filles en âge d’être établies, et un fils de six ans qu’il faut élever ; quant à lui sexagénaire ne se sentant plus en état de travailler, il n’a d’espoir pour ses vieux jours et pour ceux de sa femme et pour ses enfants que dans la sensibilité et la justice de Son Excellence ; elle se rappellera les promesses d’indemnité qu’elle lui fit, et qu’elle devait réitérer à Madame Caire, après qu’il fut parti muni de l’agrément de Son Excellence pour aller (avec son collègue Mr Pernety, également malheureux) faire un emprunt en Italie. Ces promesses le soutiennent ; il attend avec confiance les effets dont il conservera la plus vive reconnaissance.

Livourne le 28 mars 1794

Laurent Caire

Notes et références

Source : Lettre d'Henri Foulcher sur Laurent Caire du 21 septembre 1985