Testament d’Adolphe Caire – 20 novembre 1916

Adolphe Caire
Collection Bernard Caire

En écrivant ici mes dernières volontés je recommande à mes enfants de vivre toujours en bonne intelligence et de toujours penser que mon dernier chagrin en mourant serait qu’il y eut du désaccord entre eux.

Je prie Dieu de m’éclairer dans mes dernières dispositions et je prie mes enfants de croire que les aimants tous les trois d’une égale et immense affection elles n’ont d’autre but que de réparer autant que possible l’inégalité qui s’est produite dans le partage entre mes enfants de la fortune de leur mère1 et de couvrir une partie des pertes qu’a faites Henri dans sa malheureuse affaire2.

Je recommande particulièrement Henri d’user de toute son influence pour soutenir l’union dans la famille.

Faites-moi des funérailles simples, ni fleurs ni couronnes. Si vous désirez un piqué de soldats devant la porte, mon brevet de la Légion d’honneur est dans le grand tiroir de droite de mon bureau, ainsi que le titre de concession du tombeau, si vous voulez le poêle3 du Tribunal de commerce, il faudra aviser le tribunal de ma mort.

Je laisse avant tout partage une somme de soixante mille francs à Henri et également une somme de 60 soixante mille francs à Amélie.

Je laisse également à Henri le mobilier du rez-de-chaussée de la maison. Le restant du mobilier sera partagé entre mes filles. Le linge et l’argenterie seront partagés entre mes trois enfants.

Je lègue à Jeanne Jauget une somme de cinq cents francs en reconnaissance de ses longs services et du dévouement qu’elle m’a toujours témoigné.

Je prie mes enfants de distribuer aux domestiques qui seront dans la maison au moment de ma mort une gratification qui pourra aller de cent à cinq cents francs d’après leur ancienneté dans la maison et le dévouement qu’elles m’auront témoigné.

Je recommande encore une fois à Marguerite de ne voir dans ces dispositions qu’un désir de justice et la réparation d’un malheur.

Je recommande d’attendre au moins six mois après la fin de la guerre pour procéder au partage car il y aura forcément une période d’inégalité dans le classement des valeurs qui composent mon portefeuille.

Fait à Marseille sain de corps et d’esprit le 20 novembre 1916.

Signé : A. Caire.

Notes et références

Références

Testament d'Adolphe Caire

Notes

  1. Cécile Pascalis
  2. Sur le conseil de son père, Henri avait investi un capital important dans la savonnerie de son beau-frère Eugène Rouard, savonnerie fondée par son beau-père Louis Xavier Rouard. Henri Caire a perdu la totalité de cet investissement.
  3. Drap mortuaire

Jeunesse d’Henri Caire

Enfance d’Henri Caire au boulevard Périer

Adolphe et Berthe Caire habitaient un bel hôtel particulier au 14 bd Périer à Marseille, avec tennis et billard (qu’Henri a emporté à Freycinet). Mais après le décès de Berthe en 1895, il ne faisait pas vraiment bon y vivre. A la suite d’une hépatite aiguë, Adolphe Caire avait du quitter la marine après trois ans de service et passait le plus clair de son temps dans un fauteuil. Quand il entendait rire Marguerite, Henri et Amélie (future madame Émile Saint Rémy Pélissier) ses enfants, il s’écriait : « Votre mère et décédée, ne l’oubliez pas ! »

Famille Caire dans le jardin du boulevard Périer
Collection Bernard Caire

Henri Caire et Raymond Giraud pratiquent l’aviron

Après son bac, Henri Caire suivit des cours de droit et se lia d’amitié avec Raymond Giraud avec qui il partageait un cabanon sur la corniche, au vallon des Auffes, et pratiquait l’aviron.

Claire Giraud amoureuse d’Henri Caire

Claire Giraud, sœur de Raymond, en pinçait pour Henri Caire. Mais celui-ci ne l’appréciait pas beaucoup et elle épousa Pierre Massot (frère de Marie Massot, grand-mère de Charles de Raphélis-Soissan). Pierre Massot était connu de tout Marseille pour son charme, ses conquêtes galantes, sa fortune et sa présidence de la société hippique de Marseille. Henri Caire disait d’eux : « Ce coquin de Pierre et cette peste de Claire ! »

Claire avait la rancune tenace : Quand Charles de Raphélis-Soissan et Mireille Caire se sont mariés, ils ont invités Pierre et Claire Massot. Pierre est venu mais Claire s’est abstenue. Après le décès de Pierre, il y eut, parait-il, un souvenir pour chacun de ses neveux sauf pour Charles de Raphélis-Soissan !

Les Massot avaient un mas de plusieurs centaines d’hectares à Entressens en Camargue. Comme Pierre et Claire Massot n’ont pas eu d’enfant, à leur décès chacun de leurs neveux hérita d’une part d’indivision. En guise de revenus, Charles et Mireille de Raphélis-Soissan ont reçu une année une dinde et une autre année un carnet de timbres !

Notes et Références

Récit de Mireille Caire

Henri Caire achète sa première voiture et reçoit sa première contravention

Achat d’une De Dion-Bouton

En 1906, Henri Caire a 21 ans. Son père Adolphe est d’accord pour acheter une voiture. Henri sait déjà conduire et adore mettre son nez dans les moteurs et cela facilitera les voyages au Vernègues.

Le permis de conduire ne pose pas de problème : il est délivré par l’Automobile Club marseillais et Henri en connait les membres.

C’est Henri qui choisit la voiture et Adolphe, sans réfléchir davantage, achète la de Dion-Bouton à son nom.

Voilà Henri tout faraud qui se met à circuler en ville avec ses amis. Las, les règlement sont les règlements et la voiture à l’époque est considérée comme dangereuse en ville et la vitesse est limitée.

Première contravention

La semaine n’est pas terminée qu’Henri reçoit sa première contravention et parution au tribunal. Mais la voiture étant au nom d’Adolphe, c’est lui qui se voit condamné à un jour de prison !

Adolphe se précipite donc au tribunal : « Monsieur le juge, je suis juge au tribunal de commerce. Comment voulez-vous que j’aille en prison ? » Le juge est très compréhensif et Adolphe met immédiatement la voiture au nom de son fils Henri.

Henri Caire n’a jamais dit s’il avait eu d’autres contraventions !

Notes et références

Souvenirs de Mireille Caire

Henri Caire se marie – 17 mars 1925

Henri Caire a acheté Freycinet en 1923 à cet endroit-là parce que dans la Drome il avait tout un groupe d’amis des Jésuites, Robert de Bretteville, Auguste Abeille, Henry Monroe…

A 40 ans, un beau soir, Henri Caire a dit à ses amis qui étaient réunis : « Je crois que c’est le moment pour me marier ! » Chacun a cherché dans ses relations une jeune fille susceptible de convenir. Auguste Abeille a dit : « J’ai des petites cousines, je vais écrire à Angèle que je connais ». Il a écrit à sa cousine Angèle Abeille pour se renseigner sur le caractère de Marcelle. Apparemment, les renseignements ont été satisfaisants et une présentation a été faite à Leyronat, la maison des Abeille à Crest.

Henri Caire est allé raconter cette rencontre à Robert de Bretteville et à sa sœur Renée. Renée lui a demandé : « As-tu prévenu ta sœur Marguerite ? » Henri a répondu : « Pas encore ! » Alors Renée de Bretteville lui a dit qu’elle allait s’en charger et c’est elle qui a prévenu Marguerite Caire du futur mariage de son frère.

Henri Caire et Marcelle Abeille se sont mariés le 17 mars 1925.

Sources :

  • Récit oral de Mireille Caire,
  • Michel Ancey avait conservé la lettre d’Auguste Abeille.

Le Moulin de Vernègues

Louis Laurent Caire et Marie Cécile Pascalis, mariés le 27 février 1832, ont eu trois enfants :

  • Marie Victoire Caire qui a épousé Eugène Perraud et a eu quatre enfants,
  • Louise Honorine Caire, sœur jumelle de Marie Victoire et qui, après le décès de Marie Victoire, a épousé son beau frère Eugène Perraud et a eu un enfant,
  • Adolphe Caire qui a épousé Berthe Rouard et a eu cinq enfants.

Le 24 décembre 1839, pour éviter une cohabitation difficile à Gémenos avec sa belle-sœur, Marie Cécile Pascalis, veuve de Louis Laurent Caire, achète le Moulin de Vernègues au prix de 115 000 francs.

Le 27 janvier 1858, Adolphe Caire achète en propre 21 hectares attenants au domaine au prix de 2 837,17 francs.

Le 22 avril 1863, Marie Cécile Caire décède et le Moulin de Vernègues revient aux enfants de Marie Victoire, à Louise Honorine et à Adolphe Caire.

Le 5 mars 1909, Adolphe rachète les parts des héritiers de Marie Victoire au prix de 20 000 francs. Le moulin de Vernègues appartient alors à 2/3 à Adolphe Caire et à 1/3 à Henri Perraud, fils de Louise Honorine et Eugène Perraud.

A la fin de la première guerre mondiale, Henri Caire a dit à son père Adolphe : « Si nous donnons son congé au fermier, je me sens capable de gérer et d’exploiter la propriété. » Adolphe a donné son accord et on a donné son congé au fermier. C’est alors qu’un élément que ni Adolphe ni Henri n’avaient prévu est intervenu : Le fermier a fait valoir son droit de garder le matériel d’exploitation, les bêtes de trait, le troupeau, etc en le payant au prix de départ, c’est-a-dire au prix pratiqué avant l’inflation galopante de la guerre de 1914 tandis que la propriété devait tout racheter au prix fort de 1919. Adolphe a reculé et, craignant d’avoir sur les bras une propriété qui ne serait pas entretenue, il a voulu la vendre très vite avant qu’elle ne se soit dépréciée.

Le 15 mai 1920, Adolphe Caire, sans profession, et Henri Perraud, notaire à Marseille vendent le Moulin de Vernègues d’un surface de 98 hectares au prix de 150 000 francs.

Le 20 décembre 1920, Adolphe Caire décède à Marseille.

Notes et Références