Fin de carrière professionnelle d’Aza Vincent

En 1848, à 54 ans, Aza Vincent est directeur des constructions navales de l’arsenal de Toulon et inspecteur des écoles d’Arts et Métiers.

Le 27 mars 1848, le Ministre de l’Agriculture supprime le poste d’Inspecteur général des écoles nationales d’Arts et Métiers, suppression fondée sur la nécessité d’alléger le budget de toutes les dépenses qui ne se justifient pas par d’impérieux besoins de service1. Aza Vincent proposera de poursuivre sans rémunération mais cela lui sera refusé.

En juin 1848, un esprit d’insubordination agite les ouvriers2. Le préfet maritime, Alexandre Ferdinand Parseval est sanctionné et remplacé par Armand Joseph Bruat. Le 2 août 1848, Aza Vincent est sanctionné à son tour et nommé directeur des constructions naval à Cherbourg3 avec effet immédiat4.

En octobre 1848, Aza Vincent sollicite du ministre de l’agriculture, Charles Joseph Tourret, une place pour son fils à l’école forestière de Nancy5.

Le 26 novembre 1848, suite à un malheur qu’il vient d’éprouver (sans doute le décès de sa belle-mère, Joséphine Félicité Mourre le 18 novembre 1848), Aza Vincent demande un congé de deux mois6.

Le 30 janvier 1849, alors qu’il est encore à Toulon, Aza Vincent a une congestion cérébrale7. Le 6 mars, le docteur Camille Auban certifie qu’Aza Vincent est dans l’impossibilité de se rendre à son poste8. Il obtient du Ministre de la Marine un congé jusqu’au mois de juin9.

Le 26 mai, Aza Vincent écrit au préfet maritime de Toulon pour l’informer que sa santé, loin de se rétablir, avait reçu une nouvelle atteinte qui, selon l’avis des médecins, le mettrait dans le cas l’été prochain d’aller prendre les eaux dans les Pyrénées10. Joseph Grégoire Casy, Préfet maritime de Toulon, l’autorise à se présenter devant le conseil de santé. Le 29 mai, le conseil de santé constate qu’Aza Vincent a été atteint d’une maladie cérébrale très grave, que les divers traitements employés jusqu’à ce jour n’ont que faiblement amendée, et qu’il a besoin d’un second congé dont il n’est pas possible de limiter la durée pendant lequel il ira faire usage des eaux des Pyrénées11.

Le 16 juin, par un arrêté du Président de la République, Aza Vincent est admis à faire valoir ses droits à la retraite, à titre d’ancienneté de service et sur sa demande12. Il a trois mois pour faire valoir ses titres et sera à la retraite le 16 septembre, avec une pension de 3.547 francs13.

Entouré des soins de sa famille, Aza Vincent survit pendant près de quatre ans et décède le 19 février 1853 dans sa maison des Minimes, à La Valette du Var.

Notes et références

  1. Lettre de H. Fleury du 25 mars 1848
  2. Lettre de Garnier du 19 juin 1848
  3. Lettre de Raymond de Verminac du 2 août 1848
  4. Lettre d’Armand Joseph Bruat du 7 août 1848
  5. Lettre de Charles Joseph Tourret du 16 octobre 1848
  6. Lettre de Garnier du 9 novembre 1848
  7. Frédérik Lantelme – Trois familles provençales : Vincent, Gérard, Bennet – page 10
  8. Lettre du docteur Auban du 6 mars 1849
  9. Lettre d’Aza Vincent du 30 mai 1949
  10. Lettre d’Aza Vincent du 26 mai 1949 au préfet maritime de Toulon
  11. Lettre du docteur Camille Auban du 29 mai 1849
  12. Lettre de Varagnat du 25 juin 1849
  13. Frédérik Lantelme – Trois familles provençales : Vincent, Gérard, Bennet – page 10

Histoire de la Villa Maria à Léoube (suite) – La balustrade -1883

Villa Maria

Terrasse de la Villa Maria à Léoube (avant 1921) peint par Jacques Dor

Dans ses lignes extérieures, aussi bien d’ailleurs que dans son aménagement intérieur, la « Villa Maria » est restée à très peu près identique au « Poste des Douanes ». C’est assez dire qu’elle constitue une habitation des plus modestes à tous égards. Mais, ce qui en fait sans contredit l’une des villas les plus charmantes qui soient, c’est son site merveilleux qui égale les sites les plus admirés de cette Côte d’Azur pourtant si riche en décors féeriques.

La terrasse de la Villa était primitivement rectangulaire, assez étroite et munie d’un simple garde-fou mi partie de fer et de bois rustique. En 1883, elle a été élargie en demi-cercle et bordée d’une gracieuse balustrade en pierre. Les deux superbes chênes verts qui l’encadrent si joliment et la couvrent de leur ombre ont été plantés à l’époque de la construction.

Notes et références

Le vieux Léoube – Henri Vincent – 1914 (inédit)

Léoube : Construction de la Villa Maria – 1847

Sous le premier Empire, des « Postes sanitaires » chargées de surveiller la navigation côtière étaient installés sur tout le littoral de Provence ; ils étaient très rapprochés ; il y en avait à Cavalaire, au Lavandou, à Bénat, à Bréganson, à Léoube… Dans chacun d’eux, l’autorité était exercée par un « préposé de santé » qui n’était autre qu’un habitant notable du pays. C’est ainsi que M. Bernardin Brémond fut préposé au poste sanitaire de Léoube. À sa mort, en 1819, les fonctions dont il était investi furent confiées au préposé du poste de Brégançon. Les postes sanitaires de Brégançon et

Villa Maria, avec quelques membres de la famille en tenue d’époque !

de Léoube cessèrent de fonctionner le 13 octobre 1849 et le service qui leur incombait fut alors remis à l’Administration des Douanes dont une recette était installée depuis quelque temps déjà dans les dépendances du château de Léoube. Pour mettre fin aux ennuis qui résultaient de ce voisinage trop immédiat, J. E. Gérard fit construire en 1847 sur la plage de Léoube une jolie maison qui fut exclusivement destinée au logement des douaniers. En 1866 le « Poste des Douanes » de Léoube fut définitivement supprimé. La maison spécialement construite à cette fin fut, depuis lors, habitée par une branche de la famille Gérard (branche Edmond Vincent) et pris désormais le nom de « Villa Maria ».

Arrivée de la famille à Léoube – 1840

Voici un texte sur Léoube écrit par « Bonne maman », Félicité Marcotte de Quivères, épouse d’Emile Gérard (et reproduit par Henri Vincent) :

Léoube
Léoube

En 1840 la propriété de Léoube fut achetée par le père de famille Émile Gérard. Ce fut une grande joie pour tous d’arriver dans ce site abrupt et isolé qui semblait le bout du monde. Il fallait huit heures par des chemins impraticables pour y arriver. Depuis les Vieux-Salins, le trajet se faisait en charrettes. Souvent l’on versait. Les torrents de Maravenne et de Pansard, à traverser, n’étaient pas toujours guéables. Toutes ces difficultés augmentaient le charme de cet endroit si solitaire qui, avec ses bois impénétrables, ses hautes bruyères fleuries et embaumées, ses cystes, ses lauriers roses, ses myrtes, donnait l’idée d’une terre vierge et inexplorée.

Toute la famille, grands et petits, vieux et jeunes, comme de nouveaux colons, alla prendre possession du nouveau domaine. Tout y manquait, tout était à faire pour s’y installer. Mais la première pensée, le premier cri fut : Où aller à la messe ? Deux heures de chemins affreux pour se rendre soit à Bormes, soit à la Londe. Emile Gérard, le père bien-aimé, déclara aussitôt que la demeure du Bon Dieu serait le premier ouvrage entrepris. On examina les lieux. Un petit bâtiment délabré s’appuyait sur une des vielles tours du château. Là demeurait une vielle femme qui donnait à boire aux travailleurs. Elle raconta qu’avant la Révolution, ce petit réduit était une chapelle, qu’on y avait dit longtemps la messe et que l’ancienne propriétaire, Madame Brémond, lorsque tout le monde était couché, venait chaque soir s’agenouiller au milieu du cabaret pour demander pardon à Dieu des blasphèmes et des mauvaises paroles qui se proféraient dans ce lieu anciennement bénit.

On fut vite d’accord pour réédifier en cet endroit une chapelle. Les maçons et les ouvriers furent mis à l’œuvre. Mais que de difficultés et d’embarras pour les matériaux à employer ! Tout venait par mer ; et quel évènement, quelle joie, lorsque la barque arrivait. On allait en troupe au bord de la mer, assister au débarquement. C’étaient les matériaux, les portes, les petites fenêtres, puis enfin, quelle joie ! l’autel que l’on trouvait bien beau.

Chaque membre de la famille apporta son présent pour orner et meubler la chère chapelle. La grand-mère Gérard offrit le calice, souvenir d’un Père Dominicain de la famille, mort dans les missions d’Amérique. La croix fut donnée par Madame de Roux, la première qui alla jouir dans un monde meilleur des joies éternelles. Les chandeliers, les ornements, les linges sacrés furent offerts par tous les autres. Tout était bien modeste. Sur l’autel, une simple gravure représentant la fuite en Egypte. Cependant, Letuaire, artiste renommé à Toulon et l’oncle Charles Marcotte peignirent des fresques.

L’érection achevée, la bénédiction fut enfin décidée pour le 8 septembre 1841. La petite chapelle fut placée sous le vocable de la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie. 

Mariage de Louis Laurent Caire et Cécile Pascalis le 27 février 1832

Présentation de Louis Laurent Caire et Cécile Pascalis

Fin 1831, Louis Laurent Caire, négociant à Guernesey, vient passer l’hiver en Provence pour raison de santé.

Fin janvier 1832, Jean Abeille, ancien négociant à Marseille, organise la présentation entre Louis Laurent Caire, fils de son ami Laurent Caire, ancien négociant à Toulon, et Cécile Pascalis, fille de son autre ami le général Antoine Pascalis.

Louis Laurent Caire et Cécile Pascalis se plaisent et décident le soir même de se marier (Louis Laurent a 43 ans et Cécile 23 ans, sa sœur cadette est déjà mariée).

Le mariage est prévu pour mi-février.

Certificat de décès de Laurent Caire

Pour se marier, Louis Laurent Caire doit obtenir les certificats de décès de ses parents.

Son père, Laurent Caire est décédé en 1800 en émigration à Livourne.

Par chance il a une sœur Victoire Caire établie à Livourne. Le 2 février 1832 il lui écrit pour lui annoncer son prochain mariage et lui demander de s’occuper du certificat de décès. Elle reçoit cette lettre le 8 février et s’occupe immédiatement du certificat de décès.

Toutefois, en cas de retard de ce certificat de décès, il envisage d’établir un certificat de non connaissance du lieu de sa mort, ce que finalement il devra faire ! (Cf. Lettre au général Antoine Pascalis du 3 février 1832)

Certificat de décès de Victoire de Lespine

La mère de Louis Laurent Caire, Victoire de Lespine, a trouvé à son retour d‘émigration que le nom de Lespine était difficile à porter et s’est faite appeler du Planty. En effet, son père s’appelait de Lespine du Planty mais à sa naissance, elle n’a reçu que le nom de Lespine.

A son retour d‘émigration, Victoire ne s’est pas établie à Toulon d’où était originaire son mari et où ils s’étaient connus et avaient vécu, mais à Gémenos où elle ne connaissait personne (elle achètera à crédit une maison dont elle occupera une partie avec sa fille Eugénie et elle louera le reste à Elias Massad, un ancien mamelouk de la garde impériale !). Son décès (d’un cancer) est donc déclaré sous le nom de Duplanty. Seule sa fille Eugénie aurait pu corriger son nom mais Eugénie était autiste et n’a rien dit.

Louis Laurent Caire fera appel à ses amis Emmanuel et Auguste Abeille1 pour témoigner que Victoire Duplanty et Victoire de Lespine sont bien deux noms pour une même personne.

Mariage de Louis Laurent Caire et Cécile Pascalis le 27 février 1832

Le mariage sera célébré le 27 février 1832. Voici le récit qu’en fait Louis Laurent Caire à sa sœur Honorine :

« Ma chère Honorine.

Notre mariage est à la fin terminé et précisément comme nous l’avions projeté nous eûmes le plaisir de recevoir les dames Abeille le dimanche. Elles vinrent à temps pour le dîner de 6 à 9 heures que Mme Pascalis leur avait préparé et dans la soirée l’on fit une loterie de jolis petits objets qui peuvent rappeler la circonstance et qui égaya beaucoup la société.

Le lundi la signature du contrat amena bien des pleurs et les vers que je te joins ne purent être chantés parce qu’ils attendrissaient trop les personnes qui voulaient l’entreprendre. Tu verras qu’à la requête des dames Abeille, M. Pascalis ne t’a pas oubliée au second couplet et tout le couplet a été fait à ton intention. Dis-moi comment on les trouve à Toulon ?

Après le dîner de noces qui était fort bon et qui se passa très gaiement, nous fûmes à la Commune y passer le contrat civil et puis un bal bien animé employa à notre soirée : Je retrouvais des forces pour danser et il y avait nombre d’années que je n’en avais fait autant. Une très jolie collation et un thé, punch etc termina la séance. Nous partîmes enfin pour l’église à 2 heures du matin et après une cérémonie bien touchante et solennelle nous vînmes enfin nous coucher à 4 heures du matin. Si je me félicitais de mon mariage avant, il est inutile de te dire que je m’en félicite encore plus après et que je ne doute plus de l’harmonie et de la douce union qui va m’unir à Cécile[…] »

Notes et références

Sources

Lettre du général Pascalis à Georges Gariel – 27 février 1832

« La providence vient de me sourire en me présentant un parti très convenable pour ma fille ainée [Marie Cécile Pascalis2], et son mariage aura lieu dans une quinzaine de jours. Un bon ami que j’ai à Marseille a tout préparé sans en rien dire et quand la chose a été convenue entre lui et mon gendre futur, ils sont venus à Aix me demander en même temps à diner et ma fille ; les deux plus intéressés à cette affaire ne se connaissant pas, ont paru satisfaits et tout a été réglé dans la même soirée. Mr Caire est de Toulon ; son père [Laurent Caire3] était l’intime ami de M. Abeille chez qui j’ai logé 12 ans à Marseille4 ; mes enfants sont nés dans sa maison ou y sont arrivés à un et deux ans, et se sont élevés avec les siens : de sorte que toute la famille s’est mise en quatre pour faire réussir ce mariage. L’Epoux futur est né à Livourne pendant l’émigration, il est le cadet de sa famille et reste le seul garçon. A peine a-t-il connu son père. Une sœur qui a vingt ans de plus que lui, et qui fut mariée à Livourne l’a élevé et lui a tenu lieu de mère. Il a perdu la plus grande partie de sa fortune en France, mais il a réparé ce malheur par une assez jolie fortune qu’il a fait, soit à Livourne, soit à Trieste, soit enfin en Angleterre d’où il ne fait que revenir, après un séjour de douze ans. Il a quarante ans, il est d’une bonne tournure et a de l’éducation. »

Acte de mariage de Louis Laurent Caire et Cécile Pascalis

L’an mil huit cens trente deux et le vingt-sept février à sept heures du soir, par devant nous adjoint remplissant par délégation de Monsieur le Maire d’officier public de l’Etat civil de cette ville d’Aix ; a comparu à l’hôtel de ville Monsieur Louis Laurent Caire, négociant et propriétaire, né à Toulon département du Var le dix neuf juin mil sept cens quatre vingt huit, y domicilié, fils majeur de feu Monsieur Laurent Caire et de feue Victoire Alexandrine de Lépine, décédée en la commune de Gémenos, Bouche du Rhône, le vingt huit janvier mil huit cens onze, le dit futur époux nous déclare d’affirmer par serment que bien que dans l’acte de décès de sa mère on l’ait désignée par le seul nom du Duplanty, cependant celle-ci est la même personne que Madame Victoire Alexandrine de Lépine désignée dans l’acte de naissance du futur époux, qu’elle avait ajouté depuis à ce nom celui de Duplanty, pourque son autre nom de Lépine était en opposition avec l’esprit du tems, il nous déclare et affirme de plus par serment que le lieu du décès et celui du dernier domicile de ses autres ascendants lui sont inconnus.

A aussi comparu Mademoiselle Marie Cécile Pascalis, sans profession, née à Sénigallia royame d’Italie le dix neuf novembre mil huit cens huit, fille majeure de Monsieur Antoine André Pascalis, officier général en retraite, chevalier de St Louis et officier de la Légion d’Honneur, et de Madame Gabrielle Maurin ici présents et consentants, domiciliés en cette ville d’Aix y demeurant depuis de longues années avec ses frères et mère rue du Boeuf n°22, lesquels futurs époux nous ont requis de procéder à la célébration du mariage […] et dont les publications ont été faites devant la principale porte des hôtels de ville savoir, de celui de Toulon, la première le cinq du présent mois de février, et la seconde le douze du même mois, et de celui d’Aix, la première le dit jour douze février courant et la seconde le dix neuf même mois, jours de dimanche, toutes à l’heure de midi ; aucune opposition audit mariage ne nous ayant été signifiée, faisant droit à leur réquisition, après avoir donné lecture de toutes les pièces ci-dessus mentionnées et du chapitre six, titre cinq du code civil intitulé du mariage, nous avons demandé au futur époux et à la future épouse s’ils voulaient se prendre pour mari et pour femme, chacun d’eux ayant répondu séparément et affirmativement, nous déclarons au nom de la loi que Monsieur Louis Laurent Caire et Mademoiselle Marie Cécile Pascalis, sont unis par le mariage, de quoi nous avons dressé acte en présence de Messieurs Jean François Pascalis, négociant, âgé de soixante quatre ans, cousin de l’épouse, François Marie Justin Verger, conseiller à la cour royale, âgé de cinquante un ans, non parents des époux, domiciliés à Aix, y demeurants, Paul Emmanuel Abeille, propriétaire, âgé de trente cinq ans, et François Auguste Abeille, aussi propriétaire, âgé de trente deux ans. Ces deux derniers domiciliés à Marseille, y demeurants, non parents des époux, les dits témoins nous déclarent et affirment par serment que bien que dans l’acte de décès de la mère du futur on l’ait désignée par le seul nom de Duplanty, cependant celle-ci est la même personne que Madame Victoire Alexandrine de Lépine désignée dans l’acte de naissance du futur époux qu’elle avait ajouté depuis à ce nom celui de Duplanty parceque son autre nom de Lépine était en opposition avec l’esprit du tems, ils nous déclarent et affirment de plus sous serment que quoi qu’ils connaissaient l’époux, ils ignoraient le lieu du décès et celui du dernier domicile de ses autres ascendants, les déclarations ci-dessus ont été faites en exécution de l’avis du Conseil d’Etat du 4 Thermidor an treize, inséré au bulletin des lois et après qu’il leur a été donné lecture du présent acte ont signé avec nous, ainsi que les époux et les père et mère de l’épouse.

Notes

  1. Louis Laurent Caire a connu Emmanuel et Auguste Abeille enfants en émigration à Livourne.

Compagnie Gérard & Fils

En 1830, la compagnie Gérard & Fils1 obtient la concession du service de messagerie entre le continent et la Corse. Le service était assuré par trois navires à vapeur et à roues à aube, le Golo, le Liamone et le Var.

C’est la première fois qu’un service régulier est assuré entre le contient et la Corse. En voici les horaires :

  • Toulon – Bastia : Départ le jeudi à 8 heures – Arrivée le vendredi à 14 heures,
  • Toulon – Ajaccio : Départ le dimanche à 8 heures – Arrivée le lundi à 10 heures,
  • Bastia – Toulon : Départ le dimanche à 10 heures – Arrivée le lundi à 16 heures,
  • Ajaccio – Toulon : Départ le jeudi à 10 heures – Arrivée le vendredi à 12 heures.

Outre le courrier, les bateaux transportent aussi quelques passagers dont Honoré de Balzac, Gustave Flaubert et Prosper Mérimée. C’est ainsi que le 2 octobre 1840, Gustave Flaubert embarque à Toulon pour son baptême de mer à bord du Golo. L’état de la mer est épouvantable et Flaubert est victime du mal de mer.

En 1842, très critiquée, la compagnie Gérard & Fils est remplacée par un service d’état, qui sera à son tour critiqué…

Notes et références

  • Corsica Maritima – Charles Finidori, 1997
  1. Joseph Dominique et Emile Gérard. Joseph Dominique décède le 21 septembre 1830 à Toulon, c’est donc son fils Emile Gérard qui prend la suite.

Lettre d’Alix Poucel à Marguerite Caire, le 11 mai 1947

Avenue Saint Marc Forcalquier (B. A.) 11 mai 1947

Ma chère Marguerite [Caire, sœur ainée de mon grand-père Henri Caire]

Vous avez été si chaudement fraternelle que je viens vous confier l’épreuve actuelle de Brindille. Cet humble ouvrage est venu au jour par circonstances providentielles et a été constamment marqué d’une manière souvent quasi miraculeuse de la volonté du Bon Dieu.

Mais à peine édité les obstacles les plus invraisemblables ont surgi. La quantité de fautes d’abord gâchant le texte ne pouvait absolument pas se produire (l’explication […] allongerait) et ne peut s’expliquer que par la volonté du Bon Dieu de mettre le signe de la Croix sur ce livre.

Toutefois on me dit que c’est à tort que je me suis inquiétée de ce que les feuilles d’errata, pauvre remède, ne peuvent tout signaler, car si ce livre plait, m’assure-t-on de divers côtés, le lecteur ne s’arrête pas à quelques vétilles. Je l’ai du reste constaté.

Mais tout à fait grave est la carence de l’éditeur qui n’est plus Xavier Mappus, lequel avait édité Victor [Poucel] et accepté les Fioretti, mais son fils Antoine qui le remplace au Puy, Xavier Mappus ayant recommencé à s’occuper à Colmar de la maison d’édition Alsatia qu’il avait fondée je crois et qui s’est remise en marche après la guerre.

Antoine s’avère un complet incapable et m’a implicitement avoué qu’il n’a rien fait et n’a pas employé les moyens de publicité de son père. Tout en me montrant une touchante bonne volonté et vendre ses livres c’est du reste son intérêt, il a tout laissé en plan.

On me dit par ailleurs que les auteurs qu’il édite se désespèrent.

Les livres de Victor intéressant seulement une qualité très spéciale de lecteurs, se vendaient cependant bien sous la direction de Xavier Mappus me disait mon frère. Et les Fioretti qui, à cause de leur genre, plaisent à tous, soulevant même des enthousiasmes, auraient été enlevées si simplement la publicité habituelle avait été faite. Mais il n’est toujours pas dans les librairies.

La première cause de mon souci à ce sujet est M. L. André [Marie-Louise André, une cousine germaine de mon grand-père] ruinée au cours de l’édition qui a voulu cependant tenir sa parole en payant immédiatement, mais a besoin de rentrer au plus tôt dans ses fonds. C’est ce que j’ai expliqué à Antoine M. auquel on dit qu’il faut tenir l’épée dans les reins.

C’est un malade, un anormal cérébral complet. Trois exemples :

  1. Pour le prix fixé par lui à 120 fr à cause d’une erreur de 20 fr en plus faite par lui donne une addition de quelques chiffres à peine.
  2. Le lui ayant fait remarquer, il m’envoie un 2ème exposé des frais (représentant impôts etc.) dans lequel les facteurs sont entièrement différents de ceux du 1er exposé et, un comble !,  les 5% alors de diminution légale au lieu d’être soustraits sont ajoutés à l’addition. J’ajoute que les frais de publicité qui font monter le prix du livre n’ont pas existé puisqu’on a rien fait !
  3. Comme je lui avais écrit que la commande de Clairière faite deux fois (et peut être trois) n’avait pas été servie, il la lui envoie ; Joseph voit les livres en magasin mais reçoit ensuite une lettre de ce pauvre Antoine lui disant qu’il ne croyait pas que Clairière lui ait rien commandé !

Évidemment il faudrait qu’il soit remplacé, mais c’est lui qui reçoit les lettres pour Xavier Mappus et l’on ne peut donc aller voir celui-ci.

Et puis conviendrait-il de l’anomalie de son fils ? Accepterait-il de la congédier ? Et comment le remplacer quant à lui-même il trouve plus avantageux probablement sa situation reprise à Alsatia et préféra la garder, dut sa maison du Puy s’en aller à la dérive.

J’ai confié ceci à notre Carmel de Lisieux où l’on a pris avec flamme la propagande des Fioretti, comme moyen d’apostolat. On fait une neuvaine à cette intention.

Les circonstances m’avaient mise en rapport […] avec Mère Agnès, prieure et sœur de la sainte. Sa secrétaire, sœur Madeleine de Saint Joseph, s’est prise pour nous d’une ardente tendresse et nous traite en véritables sœurs. Et voici la découverte : dans le monde Madeleine Pruvost, elle était  élève du SC de Saint Joseph Marseille et contemporaine  de Marguerite et Blanche Abeille qu’elle a connues.

Je reviens à la question du prix. Je crains qu’Antoine ne le tienne fixé à 120 fr alors qu’il devrait être, s’il n’avait pas commis d’erreur dans son 1er calcul, de 100 fr et avec le 10% d’abaissement, réduit à 90 fr ce qui évidemment faciliterait beaucoup la vente.

Voilà ma petite Marguerite, j’ai déchargé mon cour. J’ai cru devoir mettre notre chère M. L. au courant du moins en plus résumé. Je n’ai pas encore sa réponse et en suis un peu inquiète.

Voici bien des atouts si la publicité se faisait, si le livre arrivait dans les librairies : l’œuvre splendide du Renouveau français dont je ne peux vous parler dans cette lettre trop longue s’est enthousiasmé pour les Fioretti. Il devait les faire connaître à des milliers d’adhérents. L’œuvre de l’Union des malades la propage aussi dans son milieu. La Revue de l’Oratoire doit en parler. Son directeur m’a écrit une lettre enthousiaste. Plusieurs autres revues sont à l’horizon, mais j’attends encore que cela marche. Mon cousin de Villeneuve à Lyon a fait connaître le livre à sa fille Marthe, religieuse du SC, pour qu’elle le fasse prendre comme livre de prix, etc. etc. J’aurais envoyé un exemplaire au SC de Marseille mais puisque le livre n’est pas encore lancé en librairies (la B. Presse n’en avait commandé que 6 et Clairière 3 !), j’attends. Comment faire ?

Marcel Provence, président de l’académie d’Aix, m’annonce qu’il va faire décerner aux Fioretti le mois prochain un prix de vertu. Je n’avais pas demandé l’académie d’Aix me donne ce genre de prix mais je pourrai mettre seulement « Couronné par l’Académie d’Aix en Provence ».

Et comment se peut-il qu’avec un horizon bouché je sois encore allée écrire des suppléments pour une 2ème édition éventuelle ? Marguerite Ladevie [Marguerite Abeille, épouse d’Allyre Ladevie] m’en avait demandé pour le chapitre du Patriarche d’autres suggestions dont la vôtre, amie, pour d’autres sujets mais plutôt que cela un chapitre sur le destinataire de cette lettre dont le dévouement obscur, continuel et total, est une splendeur morale m’aurait attirée. Mais commande-t-on à l’inspiration ? J’étai alitée, fiévreuse et n’ayant pas la force de penser lorsque une autre Margueritte s’est imposée à mon esprit avec une telle puissance qu’il m’a fallu malgré tout coordonner tout cela et l’écrire. Mad, mon sévère et précieux critique, m’a obligée à de bonnes retouches. Je vous enverrai les pages qui vous intéresseront probablement ainsi qu’à Marcelle [Abeille], peut-être Henri ; Quand elles seront lues, je vous serais obligée de me les renvoyer. Là aussi, tout est vrai, même les détails.

Voici les éclaircissements que vous désiriez encore :

  • Clairon, tante de Bruno Durand, Claire Durand, aixoise. Bruno est connu surtout à Aix dans le monde des lettres. Maman mourante nous avait confiés à cette admirable amie. Son frère a épousé la sœur de la mère de Bresc, une belle sœur aussi de Mme de Terris.
  • Victoria, demi-sœur de ma belle-sœur Germaine [Bouteille, épouse d’Henri Poucel] à Aix.
  • Mme Chevalier : garde malade de la famille.
  • César et Marie, à notre service. Avez dû les voir.
  • Payan et Sr des Poulets ont été aussi chez nous.
  • C’est bien une photo de maman tenant Jean sur ces genoux qui a été reproduite [page 27]. Mais notre jeune illustrateur n’a pas saisi la ressemblance. Il achève de se former à l’École des Beaux-Arts à Lyon et s’est mis en tête des élèves.
  • Tia : Ce dessin [page 50] a été raté à la reproduction typographique qui m’a livré une vilaine figure au lieu d’une belle. C’est la part du feu.
  • Le cierge : Mme d’Aspres, de ND du Mont et de la chapelle du St St rue Marengo.
  • Hostia : grand-mère de Marguerite et BlaNche Abeille [Léonie Rolin, épouse d’Adolphe d’Almeida].
  • Magali : Mirène Dupré. Sa sœur Lilette est au 2ème monastère Visitation Marseille.
  • Printemps sur neige : Melle de Catelin, d’Aix, décédée.
  • Chef de Titres : M. Laprez du Crédit Commercial de France, actuellement à la retraite.
  • Mère adoptive : Mme Chabonier, notre voisine à Sainte Marthe.
  • Mas : M. Henri, route d’Aix à Vauvenargues (c’était là qu’avait eu lieu la tragédie d’arrêt qui a fait gémir la prison et attirer des foules).

Quand vous le pourrez, donnez-nous de vos nouvelles à tous. Quand vous reverrez Amélie [Caire, épouse d’Émile Saint Rémy Pellissier] ou lui écrirez, dites-lui notre affection. Comment va sa pauvre petite Suzanne ?

L’hôpital ici a longtemps battu son plein. Mes sœurs sont sur pied mais toujours faibles. Pour moi, la vraie loque. Point de congestion pulmonaire qui va et vient, a duré tout l’hiver. Je ne sais s’il subsiste. Toux, sclérose pulmonaire […] petite fièvre épuisante depuis un mois due surtout je crois à la |…]

Aidez-moi à rester filialement dans les mains du Bon Dieu. Nous vous embrassons bien fort toutes trois ainsi que Marcelle. Nos affectueuses amitiés à Henri.

Alix

Pardon pour cette lettre interminable. Je n’oublierai pas vos gâteries à Marseille, si délicates et trop généreuses.

Fioretti de Provence – Brindille

Fioretti de Provence
Fioretti de Provence, d’Alix Poucel

En 1946, Alix Poucel (petite fille d’Henri Abeille) publie son livre « Fioretti de Provence » où  elle raconte quelques épisodes de la vie de ses proches. Dans une lettre à son amie Marguerite Caire (tante Guy), elle en donne des clés de lecture :

  • Clairon => Melle Claire Durand, aixoise, tante de Bruno Durand. Maman mourante nous avait confiés à cette admirable amie
  • César => Au service de la famille
  • Comment Victoria s’en est allée => Demi-sœur de Germaine Bouteille, Mme Henri Poucel
  • Jean => Jean Poucel (neveu d’Alix Poucel) – L’illustration représente Jean Poucel sur les genoux de sa grand-mère, Marguerite Abeille
  • Madame Chevalier => Garde malade de la famille
  • Le cierge du Saint-Sacrement => Mme d’Aspres, de Notre Dame du Mont et de la chapelle du Saint Sacrement rue Marengo
  • Hostia => Mme d’Almeida, grand-mère de Marguerite et Blanche Abeille
  • Tia => Mme Marie Poucel, épouse de M. Chazal et sœur de Benjamin Poucel, tante d’Alix Poucel
  • Le Héro modeste => Joseph de Crozet, cousin d’Alix Poucel
  • L’Ami d’Enfance => Georges Abeille, cousin d’Alix Poucel
  • Magali => Miron Duprè
  • Printemps sur la neige => Melle de Castelin
  • Le Père Antoine => Mgr Antoine Malan, salésien, qui a passé son enfance dans la famille de Combaud (dans le texte, Mme d’Ermont => Mme de Combaud)
  • La Grande Dame => Marquise de Forbin
  • Le Dévot de la Sainte Vierge => Gabriel Abeille
  • Le Chef des Titres => M. Laprez du Crédit Commercial de France
  • Mère adoptive => Mme Chavansin, voisine à Sainte Marthe
  • Le Patriarche => Henri Abeille – L’illustration représente La Candole
  • Un mas en Provence => Mas Saint Marc, propriété des Poucel à Vauvenargues, route d’Aix

Source : Lettre d’Alix Poucel à Marguerite Caire (tante Guy)

Le 21 juin 1875, les héritiers d’Aza Vincent et Eliza Gérard se partagent la succession

Le 11 mai 1857, après le décès d’Aza Vincent survenu le 9 février 1853, ses sept enfants vivants se partagent la majeure partie des biens de la succession, presque entièrement immobilière. Ce partage est fait par tirage au sort devant B. Gas, notaire à Toulon. Ne restent dans l’indivision que :

  • le mobilier,
  • une maison située au n°13 bis place d’Armes à Toulon, composée d’un rez-de-chaussée avec magasin, de quatre étages et d’un cinquième en retrait, ayant trois fenêtres à chaque étage sur la place d’armes et quatre sur la rue Possel,
  • un domaine rural dit Les Minimes à La Valette,
  • une propriété rurale située à Toulon dite La Croix de Vidal, cette propriété avait été acquise par M. Joseph Dominique Gérard le 18 frimaire an 12,
  • un grand domaine dit Mauvanne à Hyères, acquis par M. Joseph Dominique Gérard, difficile à partager et donc vendu aux enchères avec une mise à prix de 130 000 francs.

Le 21 juin 1875, après le décès d’Eliza Gérard, veuve d’Aza Vincent, survenu le 24 janvier 1874, ses héritiers se réunissent à l’étude de B. Gas pour se partager les biens de leur mère. Le domaine dit Mauvanne ne pouvant être partagé a été vendu aux enchères. A cette succession sont ajoutées celles de leur frère Auguste et de leur sœur Emilie décédés sans héritiers. Sont présents : Emile Vincent, Félix Vincent, Marie Vincent, Elise Gérard, veuve d’Edmond Vincent et représentant leurs huit enfants mineurs, Charles Gérard agissant comme mandataire des trois enfants de Zélia Vincent et Paulin de Montéty.

Le tirage au sort est fait de la manière suivante : les biens immobiliers ont été expertisés et répartis en cinq lots de 80 000 francs. De même, les biens mobiliers ont été expertisés et répartis en cinq lots de 3 181 francs. Le notaire a préparé deux chapeaux, dans l’un il y a cinq papiers avec sur chacun le nom de l’un des héritiers, dans l’autre il y a cinq papiers avec sur chacun un numéro de lot. Chacun des présents tire un papier de chaque chapeau. Pour les biens immobiliers, le tirage donne :

  • Félix Vincent : La propriété à Toulon dite la Croix de Vidal (estimée 40 000 francs) et diverses valeurs mobilières,
  • Marie Vincent (épouse de Félix Édouard Brest) : Les Minimes à La Valette (estimés 70 000 francs) et 10 000 francs,
  • Enfants d’Edmond Vincent1 : La maison au n°13 bis de la place d’Armes à Toulon (estimée 80 000 francs),
  • Émile Vincent : La maison du n°76 de la rue de Rome à Marseille (estimée 70 000 francs) et diverses valeurs mobilières,
  • Enfants de Zélia Vincent (épouse de Paulin de Montéty) : La maison du n°6 de la rue Montgrand à Marseille (estimée 45 000 francs) et 35 000 francs.

Puis les présents tirent au sort les cinq lots du mobilier.

Notes et références

  1. Edmond Vincent est mon ancêtre

Laurent Caire (1731-1800)

Vie familiale

Laurent Caire nait le 15 septembre 1731 à Toulon. Son père Alexandre Caire est négociant et lui-même devient négociant, comme son frère Joseph Caire et ses beaux-frères Jean François Aguillon et Charles Honoré Granet.

Le 10 janvier 1775, à 43 ans il épouse Alexandrine Victoire de l’Epine du Planty, fille de Charles François de l’Epine du Planty, ordonnateur des vivres de la Marine à Toulon. Ils ont cinq enfants :

  • Victoire, née le 19 octobre 1775. Vistoire épousera Paul Guigou et décédera à Livourne sans avoir eu d’enfant.
  • Eugénie, née le 31 décembre 1776. Handicapée (autiste ?), Eugénie restera célibataire et décèdera à Gémenos.
  • Honorine, née le 2 octobre 1778. Honorine épousera François Mille et décèdera à La Seyne sur Mer sans avoir eu d’enfant.
  • Alexandre, né le 21 mars 1780 et décédé jeune.
  • Louis-Laurent né le 19 juin 1788. Il épousera Cécile Pascalis, auront des enfants et il décèdera à Gémenos.

Laurent Caire est témoin aux baptêmes de :

  • François Laurent Prat, le 17 novembre 1763 à La Seyne sur Mer1,
  • Laurent Hecker, le 10 avril 1788 à La Seyne sur Mer, les parents habitent la propriété de Laurent Caire, quartier du manteau2.

Vie professionnelle

En 1772, il achète deux vieux navires, l’Altier et l’Aventurier, les fait radouber et armer pour les mettre sur la ligne d’Amérique et des Antilles ; il a toutefois des difficultés avec la Marine pour obtenir la cession des agrès nécessaires à ces bâtiments à la veille de la guerre de l’Indépendance des Etats-Unis3.

En 1773, chargé de la fourniture du pain des troupes de la marine, il cherche à acheter des denrées à Alger4.

En mars 1780, pendant la guerre d’Indépendance américaine, Le Sagittaire, vaisseau du roi, débarque à Toulon trente-quatre barils de cochenille fine et sept de cochenille en grabeau pris dans le port de Cadix à consignation de Laurent Caire de Toulon pour des négociants marseillais5.

Les affaires marchent très bien et Laurent fait fortune : trois maisons à Toulon, une fabrique de cordes place de la Lune à La Seyne, un vaste et belle propriété de 76 hectares du quartier de Tamaris à la colline Caire (aujourd’hui fort Napoléon), avec 121.241 cannes de bois, 69.318 cannes en arbres fruitiers, une maison de maître, la Guirane, et plusieurs autres bâtiments6… Il prête de l’argent à de nombreuses personnes, en particulier au lieutenant-général de Coincy, gouverneur de Toulon, et se porte garant de Jean Sicard, trésorier des invalides de la Marine.

En 1781, Laurent Caire est consul de Toulon7.

En octobre 1786, Ishak Bey, émissaire du prince Sélim, futur sultan Sélim III, arrive à Toulon où il est accueilli et hébergé par Laurent Caire8.

A Toulon sous la Révolution

Le 24 juillet 1790, Laurent Caire est accusé d’accaparer les blés pour en faire monter le prix|19. Lettre du 19 septembre 1790 de Laurent Caire à Jean Abeille, annotée par Henri Foulcher].

Le 20 mai 1793, les trois corps administratifs de Toulon ordonnent l’arrestation de « toutes personnes ci-devant nobles, ecclésiastiques et autres suspectes », dont Laurent Caire. Sur les vives protestations des habitants de Toulon et des bourgs voisins, les 73 notables sont remis en liberté sous caution9.

En mai 1793, Victoire et Eugénie Caire séjournent au château d’Ognon, chez leur tante Mme de Chevigné10.

Le 12 juillet 1793, la ville de Toulon se révolte contre la Convention et proclame Louis XVII roi de France. La convention envoie les troupes sous les ordres du général Carteaux, puis du général Dugommier secondé par le capitaine Bonaparte.

Le 28 juillet, toute la ville est réunie pour une procession et un Te Deum pour la libération des 73 otages, dont Laurent Caire11.

Pour financier la guerre, le comité général de Toulon, par sa délibération du 16 septembre 1793 mandate Laurent Caire et Jacques-Antoine-Louis Pernety, ancien trésorier payeur général de la Marine, pour aller négocier un emprunt d’un million de piastres fortes, garanti par une hypothèque sur les propriétés communales, l’arsenal et les vaisseaux12. Une division anglo-espagnole, commandée par les amiraux Gell et Moreno, appareille le 1er octobre et transporte Laurent Caire et Jacques-Antoine-Louis Pernety et arrive à Gênes le 5 octobre. Ils y sont les témoins d’une échauffourée entre les deux vaisseaux anglais le Bedfort et le Saint-Georges et le vaisseau français la Modeste13. Le 19 octobre, Laurent Caire envoie à la municipalité de Toulon un rapport pessimiste sur les chances de succès de cet emprunt14.

Les troupes anglaises s’installent sur les terrains de Laurent Caire : « Tous les arbres de la forêt, les arbres fruitiers, toutes les provisions, les récoltes, tous les objets servant à l’exploitation du domaine, furent pris, employés aux fortifications, au chauffage et à la consommation de l’armée15. »

Le 18 décembre 1793, Laurent Caire émigre avec sa famille à Livourne16.

Le 19 décembre, les troupes révolutionnaires entrent dans Toulon et pillent et saccagent les maisons de Laurent Caire. MM. Bonneti en partant de Toulon ont laissé tous les titres des débiteurs Caire dans un bureau et ils sont perdus17.

Laurent Caire s’était porté caution pour M. Jean Sicard, trésorier des invalides de la Marine et le 26 Floréal an II – 15 mai 1794 – au titre de cette caution, la Marine saisit tous les biens de Laurent Caire et les vend aux enchères pour 109 795 francs en Assignats (soit 27 934 francs en numéraire, un prix très bas car outre l’état de ces biens, la ville de Toulon était dépeuplée et exsangue). Cette vente ne suffit pas à couvrir la caution18.

A Livourne, se constitue une importante communauté d’émigrés français : Jean Abeille et sa famille, les Aguillon, les Daniel, François Mille, Paul Guigou, Marie Ludivine du Fay, belle-mère de Laurent Caire, les Fournier…

Le 28 mars 1794, Laurent Caire écrit à son excellence, Monsieur le chevalier Elliot, ministre plénipotentiaire en Corse pour demander une indemnité pour ses pertes à Toulon, qu’il chiffre à 1.556.000 Livres19. Laurent Caire obtient du gouvernement anglais une pension de 100 livres par an.

Laurent Caire meurt à Livourne le 21 septembre 1800.

Succession de Laurent Caire

A son retour en France, sa femme va trouver les débiteurs de Laurent Caire et parvient parfois à obtenir une reconnaissance de dettes. C’est ainsi que le 4 janvier 1804, Madame Sinéty de Coincy, veuve du lieutenant-général de Coincy, reconnait devoir 3 800 Francs Tournois. Malheureusement, cette créance ne sera que très partiellement honorée20. Alexandrine Victoire de l’Epine du Planty arrive aussi à récupérer la Corderie à la Seyne et la Maison du Parti à Toulon.

Lors du vote de la loi du 27 avril 1827 sur l’indemnisation des émigrés, Louis Laurent Caire présentera une demande d’indemnisation qui sera rejetée au motif que les biens de Laurent Caire ont été légalement vendus comme caution de M. Jean Sicard.

Le 15 janvier 1827, François Mille, époux d’Honorine Caire et gendre de Laurent Caire, achète le domaine de la Rouve, c’est à dire une partie de l’ancienne Guirane de Laurent Caire. Adolphe Caire héritera de la Rouve et la vendra à Michel Pacha.

Notes et références

  1. Archives départementales du Var, page 458/536
  2. Archives. départementales du Var, page 371/502
  3. Histoire de La Seyne, de Louis Baudoin (1965)
  4. Archives des Affaires étrangères. Correspondance reçue du consulat d’Alger (1642-1792), côtes F°230-233
  5. Perception, construction et utilisation de l’espace. D’Oaxaca à Bassorah : les négociants marseillais et la cochenille mexicaine au XVIIIe siècle, Gilbert Buti
  6. Lettre de Henri Foulcher du 21 septembre 1985 avec en annexe une lettre de Laurent Caire au chevalier Elliot du 28 mars 1794
  7. La chronologie des syndics, consuls et maires de la ville de Toulon depuis 1252, Service des archives municipales de Toulon
  8. Revue d’histoire diplomatique, 26ème année, pages 524 et 525
  9. Toulon sa rade, son port, son arsenal son ancien bagne, Mongin, p 63 et 291
  10. Lettre de Camille Aubin du 19 mai 1828
  11. Mémoires pour servie à l’histoire de la ville de Toulon en 1793, Z. Pons, pages 39 et 40
  12. Mémoires pour servie à l’histoire de la ville de Toulon en 1793, Z. Pons, pages 104 et 294
  13. Toulon et les anglais en 1793, Paul Cottin
  14. Situation économique de Toulon pendant la rébellion (juillet-décembre 1793), par Eugène Coulet
  15. Supplique des héritiers de Laurent Caire à Messieurs de la chambre des députés – 15 décembre 1817
  16. Bulletin de la Société d’études scientifiques et archéologiques de la ville de Draguignan, tome XXXIV, page 555
  17. Lettre de Paul Guigou du 25 mai 1825
  18. Lettres de Paul Guigou du 26 août 1825, de M. Cogolin du 23 novembre 1824 et de François Mille du 5 juin 1825
  19. Lettre du 28 mars 1794 recopiée par Henri Foulcher
  20. Lettre de Victorine de Coincy du 24 février 1814